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Le jour où le Fonds européen de défense s’est fait couper d’un milliard

(B2) La scène se passe dans un des bureaux du Conseil européen, à l'étage du président, avant le sommet de juillet 2020. Le cabinet du Président est en conseil de guerre pour préparer la réunion qu'on espère ultime des chefs d'État et de gouvernement pour trancher le budget européen des sept prochaines années. Il faut couper quelques milliards. Mais où ?

(flux : LCP - CheckProd - sélection B2)

Le chef de cabinet du président, Frédéric Bernard (FB) mène le débat :

  • FB : ... « Il nous faut 2 milliards pour le premier pilier et 500 millions pour la liste des cadeaux. Il nous faut couper. Où ? Digital Europe
  • — hum. « Il y aussi Erasmus qui a beaucoup augmenté ».
  • — « Mais c’est une autre vache sacrée. Qu'est-ce qui serait le moins douloureux ? »
  • FB : « Pour être sincère je regarde le Fonds européen de défense et la mobilité militaire ».
  • — « Mais les Français ne vont pas être contents ? »
    FB : « Je peux demander aux Français. Que préférez-vous ? La PAC [politique agricole commune] ou la Défense ?
    Allez on retire un milliard au Fonds européen de défense. Proposons cela au Président
    . »

Et voilà !

Le Fonds européen de défense aura 1 milliard d'euros de moins. La mobilité militaire également. C'était la partie la plus facile à couper. Une conclusion évidente pour les négociateurs. C'est mon avis également. Entre Erasmus, la politique agricole commune et la défense, il n'y a pas photo, on coupera dans la défense, d'autant que la Commission européenne n'a pas vraiment fait de ce sujet une ligne rouge, ni la France. Tout cela se retrouve dans cet excellent documentaire produit par Check Prod' et diffusé sur LCP, et la RTBF.

(Nicolas Gros-Verheyde)

A partir de la 28e minute pour le Fonds défense. Mais vous pouvez tout regarder... Cela vaut le détour !

Une conclusion assez évidente

Nous savions tous, et depuis le début, que la proposition de la Commission européenne avait été calibrée de façon à pouvoir subir quelques coupes. Et, dans une négociation en général, c'est le budget le plus discret ou la coupe qui fait le moins de dégât dans l'opinion publique qui subit la perte notable. Ces deux équations ont donc conduit à cette solution assez facile : taper (un peu) dans la défense. En sachant au final que, la plus grande difficulté pour l'Union européenne n'était pas d'avoir un budget de défense européenne un peu bridé, mais en partant d'un budget à quasi zéro (ce qui était le cas dans la précédente période budgétaire) de justifier à la fois de la pertinence d'avoir une ligne budgétaire consacrée à la défense et de son utilité pour l'objectif visé : l'autonomie stratégique (lire aussi : Un Fonds européen de défense, calé à sept milliards. Ambition ratée ou réussie ?). Rendez-vous dans trois ou quatre ans.

(Nicolas Gros-Verheyde)

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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