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Afrique Nord Libye

En Libye, des bombes à sous-munitions espagnoles, des mines terrestres belges…

Section de bombe à sous-munition de type MAT-120 utilisée à Misratah © Amnesty international

(BRUXELLES2) Des fournitures européennes semblent bien utilisées durant le conflit en Libye. Selon l'ONG Human Rights Watch, le régime Kadhafi a ainsi utilisé des mortiers à sous-munitions MAT-120 de 120mm produites par l'Espagne. Les fragments de sous-munitions MAT-120 retrouvés à Misrata par un journaliste du New York Times et examinées par l'ONG « indiquent que ces armes ont été fabriquées par l'entreprise espagnole Instalaza SA en 2007 ». Or « chaque bombe de ce type comporte 21 sous-munitions à double usage, anti-personnel et anti-matériel ». Lors de l'explosion d'une sous-munition, de multiples fragments sont propulsés à grande vitesse capables de blesser ou tuer des personnes.

Mines posées par les rebelles © BBC 17 avril

L'opposition a également été pris sur le fait, cette fois en train de poser des mines d'origine belge. La BBC a montré des combattants rebelles en train de prendre des mines anti-véhicules en plastique de leurs véhicules pour les placer sur le côté de la route principale en Ajdabiya. Des mines identifiées par l'ONG comme des PRB-M3 produites en Belgique, dans les années 1970 et 1980. Cette mine PRB-M3 est « extrêmement difficile à détecter car elle est presque entièrement constitué de plastique » estime-t-on à Human Right Watch. Et elle « peut être équipée d'une fusée sensible, l'amenant à fonctionner comme une mine antipersonnel, ce qui pose un risque pour les civils à pied et en véhicules ». Plusieurs dizaines de milliers de ces mines sont entreposées dans les dépôts d'armes à Benghazi dont les forces rebelles se sont emparées après le retrait des forces gouvernementales en février, dont des variantes de la mine PRB-M3 équipée d'une fusée auxiliaire qui explosent si quelqu'un essaie de déplacer la mine. NB : l'Espagne a détruit tout son stock de mortiers en 2008.

NB : La Libye n'a adhéré ni au traité de 1997 sur les mines anti-personnel (signé par 156 pays) ni à la Convention de 2008 sur les armes à sous-munitions (signée par 108 pays, ratifiée par 56).

Engagement du CNT sur les mines

Le président  du Conseil national de transition (CNT), Mustafa Abdul Jalil, s'est engagé à ne pas utiliser les mines interdites, selon un communiqué signé le 27 avril en présence de l'Ong HRW. « Aucune des forces sous le commandement et le contrôle de la CNE n'utilisera des mines terrestres anti-personnel ou anti-véhicules. » Le Conseil s'est également engagé à « détruire toutes les mines terrestres possédées par des forces placées sous son commandement et de contrôle » ainsi qu'à « coopérer au déminage, à la sensibilisation aux risques et à l'assistance aux victimes ». Tout futur gouvernement Libye devrait « abandonner les mines terrestres et adhérer au traité de 1997 sur l'interdiction des mines terrestres ».

Condamnation de l'Union européenne

Vendredi, l'Union européenne, par la voix de Cathy Ashton, la Haute représentante de l'UE pour la politique étrangère a condamné l'usage de sous-munitions contre la population civile. « J'appelle les forces armées de Muammar Al Gaddafi de s'abstenir d'utiliser la force contre la population civile, que ce soit par les sous-munitions ou tout autre moyen. Toutes les mesures nécessaires doivent être prises pour garantir que les civils soient protégés contre les effets de ces munitions, y compris les restes non explosés de ces sous-munitions. »

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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