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La nouvelle mission néerlandaise en Afghanistan : police, un peu ; militaire, beaucoup !

Entrainement de la police nationale afghane (Crédit : ministère néerlandais de la Défense)

(B2 / Bruxelles 8 janvier) Le gouvernement néerlandais a déposé, hier (vendredi 7 janvier), devant son parlement national un projet détaillé d'envoi d'une nouvelle force en Afghanistan chargée spécifiquement de former la police afghane, de “renforcer la police publique et le système judiciaire" comme l'Etat de droit afghan (1). Cette mission viendra renforcer à la fois les effectifs d'EUPOL Afghanistan et de l'OTAN.

Une mission de 545 personnes, essentiellement des militaires

Au total 545 personnes participeront à cette mission. Dans le détail, cela comprend 225 formateurs, essentiellement militaires, envoyés dans les provinces de Kaboul et Kunduz et 5 experts judiciaires civils. S'y ajoutent : 125 militaires chargés du soutien, du médical, du renseignement et de la logistique déployés à Kunduz ; 120 personnels affectés aux 4 avions de combat F16 qui seront basés à Mazar-e-Sharif, dans le nord du pays, "pour la détection des IED" les engins explosifs improvisés ; et 70 officiers spécialistes affectés dans les Etats-majors (de l'ISAF) pour "préserver la place et la capacité d'influence internationale". Notons que la sécurité des formateurs néerlandais sera principalement assurée par les troupes allemandes, qui sont chargés du nord du pays.

Outre cette présence humaine, les Pays-Bas comptent augmenter leur contribution à différents projets : le "Law and Order Trust Fund" qui vise à développer,les capacités du ministère de la Justice ou les "Family Response Units" qui mettent l'accent sur l'amélioration de l'accès des femmes au système judiciaire.

Cette mission présente donc trois caractéristiques différentes de la mission précédente. Elle a un objectif politique affirmé : la formation (contrairement à un objectif de sécurisation et de combat de la mission précédente). Elle est de taille plus réduite : 500 personnes (contre près de 2000 dans l'ancienne mission). Elle est localisée essentiellement dans le nord du pays et à Kaboul (contre un déploiement principal dans le centre du pays, en Uruzgan, zone plutôt dangereuse, auparavant).

Quelques renforts pour la mission européenne

40 policiers viendront renforcer la mission européenne de police EUPOL, dont 25 à Kaboul pour former la direction de la police afghane et pour lacréation d'un centre national de formation dans la province de Bamiyan en mettant l'accent sur la formation des agents de police féminins. 15 agents seront déployés dans la province de Kunduz pour mettre en œuvre la police urbaine et le projet de justice de l'EUPOL. Par ailleurs, 5 experts judiciaires viendront participer au projet européen de renforcement de la justice afghane. Selon le ministère, avec l'Allemagne et la Finlande, les Pays-Bas deviennent ainsi un des principaux contributeurs de l'opération EUPOL qui souffre, depuis sa création, d'un manque d'effectifs.

Formation de policiers à Ghazni, avril 2010 (crédit : ISAF / OTAN)

Ce sont les seuls civils de cette mission. Les autres effectifs proviennent de l'armée et seront affectés dans des missions de l'ISAF. La plupart des autres formateurs (165 dont 30 de la Maréchaussée) sont, en effet, des militaires et seront déployés dans les équipes de liaison et de formation opérationnelle de la police (Police Operational Mentoring and Liaison Teams, POMLTS) dans la province de Kunduz. Par ailleurs 20 officiers de la Maréchaussée (police militaire) assureront la formation dans la province de Kunduz.

Certaines réticences

Cette mission aura un "caractère éducatif et de formation et ne pourra pas être utilisée pour des actions militaires offensives"a cependant bien pris soin de préciser le ministre des Affaires étrangères. Un propos destiné à amadouer les partis politiques réticents à toute continuation d'opération militaire (2). Mais cela ne semble pas suffire.

Le leader du parti social-démocrate (PvDA) a déjà réagi, dans les colonnes du quotidien Volkskrant, estimant cette mission en l'état "inacceptable". Si Job Cohen accepte les 40 hommes et femmes déployés pour EUPOL, il considère que les 500 personnels qui "viennent appuyer la stratégie de l'OTAN" sont de trop. La sécurité étant confiée aux troupes allemandes, il n'y a pas de nécessité, selon lui, de troupes supplémentaires. "Notre accord tenait au fait qu'il n'y aura pas d'action militaire. (...) Les effectifs ont été réduits, mais il reste une présence militaire. Et nous ne la soutiendrons pas" précise-t-il. A l'écouter, la seule chose acceptable serait un renfort à la mission EUPOL. "Si les Pays-Bas avaient confié leur soutien aux formateurs européens, il aurait été beaucoup plus facile pour nous de l'accepter". Le leader de l'opposition ne ferme donc pas la porte à toute négociation. Car le gouvernement pourrait disposer au parlement du soutien de la plupart des autres formations politiques... A suivre !

(2) On se souvient que le précédent gouvernement néerlandais a chuté sur le renouvellement de la mission en Afghanistan.

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Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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