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La lettre de Juppé à Ashton : une réflexion pour être plus réactif et déterminé (maj)

(BRUXELLES2) La lettre que le ministre des Affaires étrangères Alain Juppé à Lady Ashton (que nous avons pu lire) n'est pas une nouvelle lettre de mise en garde au Service européen d'action extérieure ou à la Haute représentante, comme on pourrait le penser à première vue. Elle est avant tout destinée à préciser certains points de la position française sur les Affaires étrangères. Le ministre sera là au Gymnich, au conseil informel des Affaires étrangères, mais avec un peu de retard. Et il a tenu à préciser certains points de la position française avant de pouvoir les développer lui-même. Pour autant, il égratigne, un peu, au passage, une Haute représentante que nous pouvons considérer en "basse pression", en reprenant ce qui est un motto de la position française : « Une affirmation forte de l'Europe sur la scène mondiale exige d'accroître la cohérence et l'efficacité de l'action extérieure de l'UE. »

Mettre en action ce qu'on a dit

« Nous devons mettre en oeuvre les principes d'action sur lesquels nous nous sommes mis d'accord mais que nous n'avons pas encore vraiment appliqués. » Il cite notamment  les partenaires stratégiques et la "réciprocité". Le Ministre attend ainsi « avec grand intérêt », la présentation par la Commission d'un instrument en matière d'accès aux marchés publics. Autre point de difficulté : « mettre plus systématiquement en cohérence les différents volets de l'action extérieure de l'UE » (politique étrangère, PSDC, politique de développement, politique commerciale) » et ceux des politiques internes de l'UE (politique énergétique notamment). « Nous avons encore des progrès à faire ».

Le fonctionnement du Service européen d'action extérieure (SEAE) doit encore être amélioré, souligne la lettre. Il doit davantage être en « interaction avec les Etats membres et développer ses capacités de proposition ». Le SEAE doit ainsi « renforcer son expertise sur les questions globales et multilatérales : non-prolifération, lutte contre le terrorisme, actions dans les enceintes internationales ». 

Etre plus réactif sur les droits de l'Homme

C'est le sujet principal de ce Gymnich cet après-midi. Un travail déjà entamé : le service diplomatique a ainsi commencé à rédiger des stratégies par pays, en matière des droits de l'Homme. Et l'idée d'un « représentant spécial de l'UE en charge des droits de l'Homme » a déjà été évoquée dans les groupes de travail, notamment au COPS (le Comité politique et de Sécurité) ce mardi (6 mars). Sa désignation devrait être faite en juin prochain, estime Alain Juppé, en même temps que l'adoption d'une stratégie globale en matière des droits de l'homme et d'un plan d'action (deux documents qui doivent encore être présentés par le SEAE). Mais surtout, le ministre engage le service diplomatique européen à « mener une action déterminée pour améliorer la réactivité » dans les démarches relatives aux droits de l'Homme hors de l'Union européenne. Par exemple : « proposer des actions de soutien aux défenseurs des droits de l'Homme en Iran ou en Syrie, renforcer des actions spécifiques, notamment contre la peine de mort ». Etc.

Mettre en commun les moyens

Alain Juppé réitère l'importance du travail de « mutualisation et de partage déjà engagé avec l'Agence européenne de Défense ». Et il « souhaite vivement pouvoir présenter en vue du Sommet de l'OTAN à Chicaco, une contribution européenne significative dans le domaine capacitaire, notamment concernant les ravitailleurs ». NB : Une initiative que la France devrait présenter au prochain Conseil des ministres de la Défense le 22 mars. Ce partage ne se limite pas aux moyens de défense. En matière consulaire, également, les délégations de l'UE jouent un « rôle important » notamment au profit « des ressortissants européens non représentés localement par leur Etat d'origine ». En matière de protection civile aussi, la mise en place du mécanisme européenne de protection civile permettra une « action plus concentrée et plus visible ».

Une lettre saluée par la Haute représentante, Catherine Ashton, lors d'un point de presse à l'ouverture de la réunion informelle des ministres des Affaires étrangères à Copenhague, vendredi (9 mars). « J'ai de très fortes relations avec Alain Juppé. Et j'attends toujours des ministres une contribution. Et j'encourage chacun à m'envoyer des courriers. J'y suis très ouverte ».

Lire également : Ashton « à l’ouest ». Londres a-t-il voulu lâcher la Baroness ? Paris critique

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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