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La problématique des VPD, il est urgent de réglementer ?

Un soldat estonien entraîné au tir et à la protection des navires marchands (crédit : ministère estonien de la Défense)

(BRUXELLES2) L'affaire du Enrica Lexie et l'ampleur diplomatique que cela prend montre qu'il y a un sérieux problème dans l'utilisation des VPD, ces équipes de protection embarquée, armés. Qu'ils soient militaires, et encore plus privés, il existe nombre de questions en matière de responsabilité, de soumission à une juridiction, d'usage de la force qui mériteraient d'être réglées et codifiées.

De l'imprécision des VPD

Depuis 4 ans que les opérations anti-piraterie sont montées en puissance, on sait fort bien qu'il existe à la fois un flou juridique et un flou opérationnel sur l'emploi de VPD militaires - et encore plus privés - à bord de navires marchands. Cependant c'est une nécessité, reconnue aujourd'hui comme participant à la baisse des chiffres de navires piratés. Il serait plus que temps et urgent de se pencher sur un statut plus précis que le droit de la mer existant pour ces VPD, de préciser leurs responsabilités. Car si les navires marchands ont un droit de libre circulation, les petits bateaux côtiers des pêcheurs également ont un droit de circulation, et peuvent aussi revendiquer l'exclusivité de leur juridiction. On devrait là aussi préciser le droit de la mer. Et notamment aussi prévoir une possibilité d'indemnisation.

Préciser le droit de la mer.

Travailler sur une nouvelle convention ou un addendum (ce qui prend du temps), et l'hypothèse d'une juridiction internationale paraissant difficile à mettre en place (sauf à confier au tribunal de Hambourg sur le droit de la mer cette fonction. Mais on pourrait, rapidement, décider d'inclure les VPD militaires, embarquant sur des navires marchands battant un des pavillons européens, sous la responsabilité du commandement de l'opération EU Atalanta. Cela aurait une certaine logique, en matière opérationnelle, permettant au besoin de mutualiser les moyens ; une certaine garantie, en matière juridique ; et une certaine cohésion en matière internationale. Cette idée avait été évoquée en son temps, notamment au moment de la mise en place de VPD militaires sur les navires de pêche français et VPD privés sur leurs homologues espagnols naviguant au large des Seychelles. Il pourrait être temps de "ressortir" le dossier.

• Mettre en place un fonds d'indemnisation. Somme toute, tous les navires marchands sont assurés. La présence de VPD à bord leur assure une sécurité quasiment à 100% (aucun navire ayant embarqué des VPD n'ayant été capturé par les pirates ; certains en revanche ont été attaqués). Il serait donc possible et souhaitable que les armateurs avec les assureurs étudient, rapidement, la mise en place d'un fonds d'indemnisation pour les pêcheurs victimes de telles méprises, qu'il s'agisse de leurs navires détruits et coulés - car ils étaient aux mains des pirates - ou, plus grave, s'il y a blessure ou mort lors d'une intervention. Le cas du Lexie n'est pas un cas isolé. Loin de là. Et régulièrement, ce blog se fait l'écho d'affaires sinon semblables mais graves. (ce n'est que la partie immergée de l'iceberg car nous n'avons pas toutes les informations).

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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