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“F…, the word” acquiert droit de cité, diplomatique (MAJ)

Victoria Nuland, alias Fucking Victoria ! (crédit : Département d'Etat US)
Victoria Nuland, alias Fucking Victoria ! (crédit : Département d'Etat US)

(BRUXELLES2) C'est un des mots les plus prononcés aujourd'hui à Bruxelles. "Fuck" ou "F... the word" ainsi que le dénomme un diplomate.

Fuck' le mot "tendance aujourd'hui

Le mot de la Secrétaire d'Etat adjointe pour l'Europe (*), Victoria Nuland, sur l'Union européenne (Fuck the UE), est aujourd'hui dans toutes les bouches et dans toutes les conversations à Bruxelles (lire : Quand Victoria « fuck » l’Europe. Ou l’Amitié vache). Le taux de buzz est tel au point qu'il est en train de rendre ses lettres de noblesse, à un mot prononcé souvent à messes basses, ou dans un énervement compulsif, voire de façon habituelle par certains adeptes du parler franc. Pas une rencontre, pas une conférence de presse où on ne demande l'avis de l'un, une réaction de l'autre. Et assurément, tous les ministres des Affaires étrangères, qui se réunissent lundi à Bruxelles, seront testés sur leur connaissance de ce terme. Un Britannique a dénié cependant que ce soit un terme employé souvent dans les couloirs diplomatiques. « C'est quand même très fort comme terme » précise-t-il, un rien amusé de la situation.

"fuck US" ? Pas du tout !

Deux jours avant la réunion des ministres des Affaires étrangères, un haut diplomate européen a ainsi dû répondre, durant de longues minutes à une bonne dizaine de questions des journalistes - britanniques et américains mais aussi d'autres nationalités - pour savoir la réaction après "F... the word" ; chacun étant plus intéressé que sur le fond. Il s'en est tenu cependant à une seule ligne de conduite : "no comment". Même à ma question de savoir si la bonne réponse était "Fuck US", il s'est bien gardé d'aller sur ce terrain-là, « C'est peut-être votre réponse. Pas la nôtre »... Le tout accompagné d'un large sourire, ironique, montrant ainsi qu'il n'entendait à la fois pas tomber dans "le piège" journalistique consistant à répliquer aux Etats-Unis, mais aussi que cette mini-polémique était, en soi rafraichissante....

Un "no comment", avec un grand sourire

A la Commission européenne, c'est la même ligne de conduite. On ne veut pas répliquer non plus et augmenter l'embarras des Américains. La Commission européenne ne fera « aucun commentaire » sur ce genre de « communications interceptées par principe », a expliqué Pia Ahrenkilde, la porte-parole de la Commission, également tout sourire. Et d'ajouter plus sérieusement, voulant revenir au sujet de fond. « Notre préoccupation est ailleurs, sur le terrain, pour assister les Ukrainiens sur le terrain, pour trouver des solutions pour l'Ukraine. C'est aux Ukrainiens de décider. Mais nous sommes là pour les assister »

La méthode, illicite, condamnée

Si aucun commentaire n'est fait, la Commission européenne a cependant condamné, assez discrètement, la méthode employée. « L'interception de communications privées ne fait pas partie de notre boite à outils pour aider l'Ukraine ». Et d'ajouter, sur une question de B2 : « Ce genre de méthodes n'est pas les nôtres ». La Commission européenne se refuse cependant à aller plus loin et désigner l'origine de ces "interceptions". La porte-parole a refusé d'en dire plus refusant également de « commenter les mesures de sécurité (qui sont) en place », afin de pallier ou prévenir ces fuites.

(MAJ) Une certaine tradition familiale du mépris des Européens

Ce "mot" ne semble pas cité par inadvertance. Outre sa familiarité - plus régulière qu'on ne le croit dans les milieux diplomatiques et ministériels, une fois les portes fermées - elle traduit un singulier mépris américain pour l'Union européenne qui n'est pas né en Ukraine. Il faut se rappeler que Victoria Nuland n'est autre que l'épouse à la ville de Robert Kagan, l'auteur de la formule "Americans are from Mars while Europeans are from Venus" dans un article publié en 2002 “Power and Weakness” opposant ainsi les Dieux de la Guerre et de l'Amour

(*) Assistant Secretary of State for European and Eurasian Affairs

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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