B2 Le Quotidien de l'Europe géopolitique. Actualité. Dossiers. Réflexions. Reportages

Actu BlogAfrique Ouest - SahelMissions Opérations

La mission PSDC pour le Sahel attendra encore bien un peu… (Maj)

(BRUXELLES2) Le dossier "Sahel" ne devrait pas figurer sur la table des ministres des Affaires étrangères et de la Défense. Au grand dam de plusieurs pays, notamment de la France ou de l'Espagne, qui poussent à ce que l'Europe s'investisse en matière sécuritaire dans cette région, notamment via une mission PeSDC, et ne se concentre pas uniquement sur le développement. « Pour réinstaller la population dans le nord (du Mali, du Niger), il faut de la sécurité, et des militaires dans la zone » explique un diplomate vert d'impatience. Mais « on rame ». Une des idées développées passerait par la formation des personnels de ces différents pays, la fourniture de matériels, mais aussi par un soutien renforcé au Cemoc - la coordination des chefs d'Etat-Major des pays du région (Algérie, Niger, Mauritanie, Mali) et un dialogue avec l'Algérie, pays sans qui on ne peut rien faire dans la région (*).

Une lente prise de conscience

Autour de la table des ambassadeurs du COPS, les sentiments restent en effet partagés. Mais les sentiments évoluent. Les Britanniques seraient prêts à laisser faire une opération tandis que les Allemands ne sont pas « contre ». Les pays d'Europe centrale et orientale sont pas très enthousiastes. Cette zone paraît un « peu loin ». On se méfie de cette "nouvelle" idée franco-espagnole tout comme d'une nouvelle mission basée sur la lutte anti-terroriste (le souvenir irakien et afghan est encore très présent), et on préférerait que les missions en cours comme EUMM Georgia ou Althea Bosnie soient mieux pourvues.

Le "problème" : le SEAE

Mais ce qui manque surtout, apparemment, c'est une initiative du service diplomatique européen. « Le problème, c'est le SEAE », précise un expert du dossier, sans doute trop poli pour ne pas désigner la source du problème : Catherine Ashton qui ne s'intéresse pas au dossier. Un document devrait être préparé. Mais il ne sera apparemment prêt que... le 8 décembre. Soit quelques jours après la réunion des ministres ! Commentaire acerbe de notre expert : « Vous savez. C'est comme le gars qui vient pour mettre l'électricité pour le mariage et arrive le lendemain. C'est bien. Mais c'est un peu tard. Le mariage s'est déroulé à la bougie et est déjà terminé. C'est çà le SEAE ! ».

Commentaire : cette lenteur n'est pas sans rappeler - toutes proportions gardées - le prélude à l'opération anti-piraterie Eunavfor Atalanta ou EUTM Somalia. On retrouve un petit groupe de pays très allants (les mêmes, Français et Espagnols) et les autres attentistes ou réticents. En 2008, sous le coup de butoir des prises de bateaux par les pirates, plusieurs pays de ce deuxième groupe (Royaume-Uni, Pays-Bas, Italie...) avaient basculé, pris conscience de la nécessité d'une opération PSDC, donné leur feu vert à l'opération, voire poussé à une réalisation rapide. Le tout aidé - il est vrai - par un Haut représentant qui savait pousser un dossier dans les interstices de l'incertitude. J'avais écrit alors, les pirates sont les meilleurs alliés de l'Union européenne. Cela peut paraître cynique. Mais c'est la réalité. Et le scénario semble se répéter aujourd'hui. Les derniers évènements dans le Sahel - 2 Français, 1 Néerlandais, 1 Suédois, 1 Sud-Africain enlevés et 1 Allemand tué dans deux évènements séparés jeudi et vendredi derniers (24 et 25 novembre), les uns dans le village de Hombori près de la frontière du Niger, les autres à Tombouctou (Mali) - pourraient accélérer cette prise de conscience. Je crains qu'il en faille encore, malheureusement, deux ou trois... avant que l'Europe à l'action.

(Maj) Accélérer le travail

Les 27 ont reconnu le 1er décembre rester « engagés pour faire face aux défis de la sécurité au Sahel ». Ils ont demandé à « la Haute représentante d'aller de l'avant dans le travail préparatoire pour un examen ultérieur d'ici la fin de l'année dans l'objectif d'un engagement de la PSD pour renforcer les capacités de sécurité dans la région, en étroite coopération avec l'Union africaine. »

(*) Le CEMOC - Comité d’état-major opérationnel conjoint - a été créé il y a deux ans. Il est installé depuis avril 2010 à Tamanrasset en Algérie et présidé par un général d'un des quatre pays fondateurs selon une rotation annuelle. C'est un Mauritanien, le général de brigade Mohamed Ould Cheikh, qui a récemment pris la présidence, succédant à son homologue malien. Le Cemoc a plusieurs fonctions : la collecte et l'exploitation des renseignements, la mise en place d'un réseau radio commun (le "réseau Ténéré), la planification d'un état-major multinational et l'organisation d'opérations coordonnées.

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

Commentaires fermés.

s2Member®