Quand Lukashenko se mue en chef de guerre et dévoile les clés de l’offensive russe sur l’Ukraine
(B2) C'est une vidéo étonnante dont nous avons tiré des captures d'image. On y voit le président biélorusse Alexandre Lukachenko devant son conseil faire un cours sur l'intervention russe et biélorusse en Ukraine.
Le président biélorusse A. Lukachenko est soit un imbécile profond, soit un as du double jeu. Il vient de se livrer, dans un show dont il a le secret devant une séance de son conseil de sécurité nationale retransmise sur la télévision nationale, à une explication des cartes de l'offensive. Se donnant un rôle de planificateur en chef des opérations russes dont il n'est qu'un exécutant. Une démonstration forte intéressante en présence de son ministre de la Défense Andrei Ravkov, qui apparait blême au fil de la démonstration.
Une offensive à partir de cinq points
Sur cette carte, on voit clairement l'offensive russe se dérouler à partir de cinq points : la Russie, mais aussi la Biélorussie au Nord ; de la mer Noire et de la Crimée (annexée par la Russie depuis 2014) au Sud ; du Donbass à l'Est.
L'Ukraine divisée en quatre zones
Sur cette carte, on voit aussi l'Ukraine est divisée en quatre zones. L'Ouest, avec ses huit oblasts (provinces) de Lviv à Khmelnytsky, est préservé.
Couper l'Ukraine de son accès à la mer
Dans le Sud, on voit clairement les objectifs : maîtriser la mer Noire, à partir de troupes venues de la mer pour faire jonction avec les troupes présentes en Transnistrie, et couper la partie ukrainienne du delta du Danube. Objectif de cette offensive, avec d'autres troupes venues de Crimée : prendre Odessa en tenaille et conquérir la province de Kherson. Mais il ne semble pas question de monter vers l'Ouest (vers la province de Vinnytsya) ou le Nord (province de Kirovohrad).
Conquérir le Donbass
A l'Est, en revanche, c'est clair : on voit une double offensive à partir du Donbass et de la Crimée pour conquérir non seulement la totalité de la province de (la république séparatiste) de Donetsk (vers Mariupol) mais aussi la province de Zaporizhzhya, notamment les villes de Melitopol et surtout le port de Berdyansk, mais aussi la province de Kharkiv. On voit clairement la volonté russe de saisir l'Ukraine "utile" (l'Est de l'Ukraine est riche en ressources minérales : charbon, manganèse, etc.), et de couper l'Ukraine de son accès à la mer.
La capitale et le pouvoir visés
Mais c'est au Centre de l'Ukraine, autour de Kiev à Soumy que se déroule l'offensive la plus majeure se déroule. On n'est plus ici dans un objectif logique visant à préserver la population russophone (argument fallacieux utilisé parfois par les Russes) ou à conforter l'indépendance des deux républiques séparatistes de Louhansk et Donetsk (objectif de l'intervention annoncé clairement par Vladimir Poutine lors de la déclaration de reconnaissance de ces "républiques"). On est ici dans une tentative de déstabilisation du pouvoir ukrainien, de volonté de renverser le gouvernement démocratique élu de V. Zelensky.
La volonté de revanche sur 2014 et 2011
Une sorte de revanche de 2014 qui avait vu le leader pro-russe de l'Ukraine, Ianoukovitch, fuir la capitale aux premières échauffourées un peu sérieuses. Une sorte de réplique également de l'offensive de l'OTAN sur la Libye qui avait vu l'opération militaire quitter peu à peu son objectif de départ (l'interposition dans une volonté de répression de Kadhafi) validé par l'ONU, pour entreprendre (sous l'impulsion des Français et Britanniques) une opération de renversement du pouvoir à Tripoli, qui a finalement abouti à la "neutralisation" du leader Mouammar Kadhafi.
(Nicolas Gros-Verheyde)
NB : contrairement à ce qui a été dit, il n'y a sur cette carte d'offensive vers la Moldavie. Il y a une jonction entre les troupes de Transnistrie et celles qui débarquent en Ukraine.