Affaire ukrainienne. La crédibilité de Gordon Sondland compromise
(B2) La procédure d'impeachment aux USA a déjà fait une victime : Gordon Sondland. L'ambassadeur américain à Bruxelles auprès de l'Union européenne est devenu un témoin clé dans la procédure de 'impeachment' lancée par les Démocrates contre le président américain Donald Trump
Un pieux mensonge
Le transcript de son témoignage (375 pages!) devant le Congrès le 17 octobre, publié mardi (5 novembre), est patent. Le plus intéressant se situe dans les dernières pages. Dans une lettre de son avocat datée de lundi (4 novembre), l'ancien homme d'affaires devenu diplomate révise son témoignage passé devant le Congrès. En gros, il reconnait avoir légèrement travesti la vérité, et cherche à corriger le tir, pour ne pas être en flagrant délit de mensonge et rompre son serment de dire la vérité.
Un souvenir soudain
Le diplomate américain se souvient maintenant avoir dit à Andriy Yermak, un proche conseiller du nouveau président ukrainien (Volodymyr Zelensky) chargé des négociations avec les USA, que « la reprise de l’aide américaine » militaire ne se ferait « probablement pas avant que l’Ukraine fournisse la déclaration publique anti-corruption dont nous discutons depuis plusieurs semaines ».
« I now recall speaking individually with Mr. Yermak, where I said that resumption of U.S. aid would likely not occur until Ukraine provided the public anti-corruption statement that we had been discussing for many weeks. »
Un dévoiement de la fonction diplomatique
Autrement dit il reconnait avoir demandé aux Ukrainiens de trouver des charges indirectes contre un des rivaux de Donald Trump, l'ancien vice-président Joe Biden, dont le fils Hunter Biden, travaille dans une entreprise énergétique ukrainienne. Le tout sur instigation directe du conseiller personnel de Donald Trump, l'avocat Rudy Giuliani, qui n'a normalement aucun rôle dans la chaîne diplomatique américaine.
L'aide sécuritaire à l'Ukraine vitale pour les USA
Une position qui va totalement à l'inverse de intérêts vitaux des États-Unis, comme Goldon Sondland le reconnait lui-même dans sa lettre. « L'aide sécuritaire à l'Ukraine est dans notre intérêt national vital. Et aucune raison valable n'aurait dû justifier son report. »
Une crédibilité entamée au niveau européen
En s'ingérant dans les affaires ukrainiennes — qui ne ressortent pas normalement des fonctions d'un ambassadeur américain auprès de l'Union européenne (l'Ukraine ne fait pas encore partie de l'Union européenne) — et en dévoyant sa fonction diplomatique pour servir les intérêts très personnels électoralistes du président américain Donald Trump, Gordon Sondland parait 'cramé' tant auprès de ses autorités de tutelle, mais surtout des institutions européennes. Sa crédibilité en Europe largement entamée, on voit mal comment il pourrait remplir ses fonctions à Bruxelles.
(Nicolas Gros-Verheyde)
Télécharger la lettre de l'avocat de Gordon Sondland