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L’Allemagne se retire de l’opération Sophia

(B2) C'était sinon attendu du moins redouté. L'Allemagne ne devrait plus fournir de moyens navals à l'opération européenne en Méditerranée (EUNAVFOR Sophia)

(Crédit : Bundeswehr / Michael Bockner)

Un moyen sans doute pour les Allemands de mettre la pression sur les Italiens et d'autres pays qui tardent à adopter un mécanisme de répartition pour les réfugiés qui pourrait finalement être le bouton nucléaire d'anéantissement de la mission. Ce retrait est d'autant plus dommageable que Berlin a été un des premiers contributeurs, avant même le lancement officiel de l'opération. De façon plus symbolique, c'est un enfant accouché par les marins allemands, qui a donné son nom à l'opération, en l’honneur de la princesse Sophia von Schleswig-Holstein (Lire : Ne dites plus EUNAVFOR Med, dites Sophia !).

Le Berlin ne viendra pas en Méditerranée...

La Bundeswehr ne participera bientôt plus à la mission avec son propre navire. La frégate Augsbourg, présente dans l'opération depuis février, ne sera pas remplacée par le navire de ravitaillement et de soutien Berlin (A 1411), comme prévu initialement.

... préférant la mer du Nord

L'inspecteur général de la Bundeswehr, Eberhard Zorn, en a informé mardi (22 janvier) les députés de la commission des affaires étrangères du Bundestag, indique le Süddeutsche Zeitung. Le Berlin participera plutôt aux manœuvres de l'OTAN en mer du Nord, restant en attente pour Sophia. Les dix militaires et marins allemands présents au QG de l'opération restent pour l'instant.

Matteo Salvini satisfait

Le ministre italien de l'intérieur Matteo Salvini a raillé cette décision dans son style habituel par un tweet : « La mission Sophia avait pour mandat de débarquer tous les immigrants uniquement en Italie, avec 50 000 nouveaux arrivants dans notre pays. Si quelqu'un se retire, ce n'est pas un problème pour nous. » C'est ainsi le baiser de la mort que prononce Rome. Pour le leader de la Ligue du Nord, obtenir l'arrêt de l'opération serait ainsi comme une victoire politique qu'il pourrait revendiquer.

Situation désespérée pour l'avenir de Sophia

Au 31 mars prochain, délai obtenu aux forceps fin décembre pour tenter de résoudre la quadrature du cercle — la répartition des migrants et demandeurs d'asile rescapés — l'opération pourrait bien devoir fermer. EUNAVFOR Med a déjà subi quelques désistements : les Belges (estimant l'opération inefficace, lire : La Belgique pourrait cesser toute contribution à l’opération Sophia en 2019), les Britanniques (pour cause de Brexit) ont, en effet, déjà décidé d'interrompre toute participation navale. Plusieurs pays tels la Grèce, la Suède, la Bulgarie ne participent pas à l'opération.

Il ne reste plus aujourd'hui (pour les moyens navals), hormis les moyens nationaux italiens, que l'Armada espagnole, à moins que la Royale (la marine française) ne se décide à sauver cette opération. Ce qui est une vraie gageure, la France — que ce soit au Quai d'Orsay (du côté des diplomates) ou rue Saint Dominique (au ministère) — n'a jamais été farouchement enthousiaste pour cette opération.

(Nicolas Gros-Verheyde)


Une baisse de voilure pour le navire amiral

La marine italienne a déjà réduit la voilure pour son navire amiral. La frégate de défense anti-missiles Luigi Rizzo (F-595) a remplacé début janvier le navire d'assaut amphibie San Marco (L-9893) qui était le navire de commandement depuis cinq mois (153 jours). On n'est pas tout à fait dans le même registre, en particulier en termes d'espace à bord et d'accueil de personnes : un équipage de 130 marins environ pour le premier avec possibilité d'accueillir 2 hélicoptères ; un équipage de 180 marins pour le second, avec possibilité d'héberger au moins 350 personnes et d'accueillir cinq hélicoptères.


 

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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