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Attaque chimique de Douma. La France publie un dossier à charge contre le régime syrien

(B2) Le ministère français de la Défense a publié un dossier de 7 pages, argumentaire établissant d'une part la réalité de l'attaque chimique à Douma, et imputant cette attaque au régime. Un raisonnement qui entend répondre à trois questions principales : les témoignages vus ou entendus sont-ils fiables ? Y-a-t-il une attaque chimique ? A qui est-elle imputable ?

Ce constat ne repose pas sur des « échantillons chimiques analysés par ses laboratoires » mais d'une part sur une analyse « des témoignages, photos et vidéos apparus spontanément sur les sites spécialisés, dans la presse et les réseaux sociaux dans les heures et jours qui ont suivi l’attaque », d'autre part sur « des témoignages obtenus par les services », et enfin sur la connaissance de la situation militaire.

1° Les témoignages sont fiables. L’examen des vidéos et images montrant des victimes et mises en ligne permettent « de conclure avec un haut degré de confiance que la grande majorité est de facture récente et ne relève pas d’une fabrication ». La nature spontanée de la mise en circulation des images sur l’ensemble des réseaux sociaux confirme « qu’il ne s’agit pas d’un montage vidéo ou d’images recyclées ». Enfin, une partie des entités ayant publié ces informations est « reconnue comme habituellement fiable ».

2° L'existence d'une intoxication chimique est clair. Les experts français ont analysé les symptômes identifiables sur les images et vidéos rendues publiques présentant une quinzaine de victimes décédées, soit dans les hôpitaux locaux ayant accueilli des patients contaminés. Les symptômes (suffocation, asphyxie ou difficultés respiratoires, fortes odeurs de chlore, présence d’une fumée verte sur les lieux touchés, hyper salivation, hyper sécrétions, cyanoses, brûlures cutanées et brûlures de la cornée) sont « caractéristiques d’une attaque par armes chimiques, notamment par des agents suffocants et par des agents organophosphorés ou de l’acide cyanhydrique ».

3°. Une action chimique des rebelles pas possible. « Les services français ne disposent d’aucune information permettant d’étayer la thèse selon laquelle les groupes armés dans la Ghouta auraient cherché à se procurer ou auraient disposé d’armes chimiques ». Les rebelles n'ont pas vraiment de moyen aérien. Et le régime dispose, avec « le dispositif militaire russe » d’une maîtrise du ciel aujourd'hui « incontestée ».

4° Une attaque en règle des forces de Bachar. Des « renseignements fiables » indiquent que « des responsables militaires syriens ont coordonné ce qui apparaît comme l'utilisation d'armes chimiques contenant du chlore à Douma le 7 avril 2018 ». Cette attaque s'inscrit dans le cadre « d’une offensive militaire globale du régime sur la région de la Ghouta orientale, engagée en février 2018 et qui a finalement permis à Damas de reconquérir aujourd’hui la totalité de l’enclave.

5° Des précédents. Le régime de Bachar el-Assad a régulièrement utilisé les armes chimiques comme de guerre. Des faits établis par les différentes enquêtes ONU-OIAC. Lire notre dossier N°59. Attaques chimiques en Syrie, les lignes rouges franchies plusieurs fois

Conclusion des « services français » : 1° « sans doute possible, une attaque chimique a été conduite contre des civils à Douma le 7 avril 2018 ». 2° « Il n’existe pas d’autre scénario plausible que celui d’une action des forces armées syriennes dans le cadre d’une offensive globale dans l’enclave de la Ghouta orientale ».

(NGV)

Télécharger le document du ministère de la défense

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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