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L’Europe trace sa route sans les Britanniques

(crédit : Conseil de l'UE)

(B2) Les Européens ont fait leur deuil du Royaume-Uni. Et ils cherchent désormais leur futur, à 27. La réunion au sommet des dirigeants européens, à 28 le jeudi (14 décembre), à 27 le vendredi (15 décembre), l'a prouvé. Entre accords et désaccords, les « Chefs » veulent désormais aborder tous les sujets, sans tabou, avec un mot-clé : l'unité.

Il est étonnant d'observer l'évolution, en quelques années, de voir certaines dissensions s'évanouir. Ce qui suscitait, dans des sommets passés, des discussions 'énergiques' sont devenus aujourd'hui des facteurs de consensus, des 'points A' dirait-on dans un conseil des ministres. C'est le cas de la défense ou de la Russie. D'autres sujets sont devenus, en revanche, crispants, car ils n'ont pas été gérés à temps, peut-être.

1. Défense européenne : un étonnant consensus

Il y a quelques années encore, ce sujet suscitait des tiraillements sans fin. Aujourd'hui, le consensus est de mise. A l'issue d'une préparation, menée au pas de charge ces derniers mois par le couple franco-allemand, soutenu par Rome et Madrid, quasiment tous les pays (sauf Malte) ont décidé de créer la Coopération structurée permanente (ou PESCO), une sorte d'Eurozone de la défense (lire : La PESCO (Coopération structurée permanente) au podium). 17 projets « structurants » vont être lancés, du commandement médical à un quartier-général déployable en cas de catastrophes, en passant par des véhicules blindés, un drone sous-marin ou des équipes de cyber-défense. Même le Royaume-Uni ne s'y est pas opposé, espérant bien y participer dans le futur... (Lire : La PESCO comportera 17 projets. La liste définitive. Détails projet par projet). C'est un « pas de géant » a souligné la Chancelière allemande Angela Merkel lors d'un point de presse commun avec Emmanuel Macron.

2. Migration : à la recherche d'une solution

La crise migratoire de 2015 a laissé des traces. Les 28 sont loin d'être unis sur la question. Et il faudra plus qu'un dîner pour trouver le consensus. Les pays de l'Est sont vent debout contre l'instauration de quotas obligatoires de relocalisation jugés trop contraignants et peu efficaces. La discussion a été « orageuse » a concédé le Premier ministre tchèque Andrej Babiš, dont c'était la première réunion. Mais elle a été utile, de l'avis de plusieurs diplomates. Des compromis s'esquissent. Les '28' se sont donnés jusqu'à juin pour trouver une solution. « Il est indispensable de faire preuve de solidarité sur le plan interne. Nous ne pouvons pas limiter la solidarité au niveau des interventions internationales » a indiqué le président français.

3. Brexit : le divorce est consommé

Les 27 chefs d'État et de gouvernement en ont fait le constat avec la Britannique Theresa May. Ils sont d'accord sur trois points clés du divorce : les droits des citoyens, l'Irlande du Nord et le chèque britannique. De façon étonnante, les Européens ont fait bloc derrière Michel Barnier, le négociateur en chef de l'UE. Et Londres en a eu pour ses frais. Toutes ses tentatives de diversion se sont heurtées à un roc. La seconde phase des négociations s'ouvre maintenant. Plus difficile ! Il s'agit de déterminer le cadre de la future relation entre l'île et le continent. Ce sera « le véritable test de notre unité », estime Donald Tusk le président du Conseil européen.

4. L'avenir de la zone euro

La France veut que la Zone Euro soit plus structurée politiquement, avec un budget propre et un ministre des Finances. Inutile de préciser que cette volonté n'est pas partagée. Tous les regards sont tournés vers Berlin. Mais, faute de gouvernement, la Chancelière allemande, Angela Merkel, n'a pu vraiment s'engager. Elle a fait un geste de bonne volonté. « C'est le bon moment pour les réformes structurelles et le développement futur de l'Union économique et monétaire », a-t-elle souligné. Rendez-vous est pris en mars pour en rediscuter.

5. L'Europe de l'éducation progresse

Les 27 se sont mis d'accord pour étendre le programme Erasmus, créer une « carte d'étudiant européenne » et favoriser l'émergence, d'ici 2024, d'une vingtaine « d'universités européennes », capables de rivaliser avec leurs homologues anglo-saxonnes.

6. Les relations avec le Russie : ce n'est plus un sujet de débat

Le point avait suscité auparavant des discussions animées. Les dirigeants étaient divisés sur la nécessité d'imposer des sanctions vis-à-vis de la Russie. La visite du dirigeant ukrainien Petro Porochenko était souvent requise pour convaincre les indécis d'une réelle situation de conflit à l'Est de son pays. Cette fois, le sujet est passé en quelques minutes lors du sommet. Une preuve de l'unité...

(Nicolas Gros-Verheyde)

Version complétée d'un article paru dans Sud-Ouest, 20 décembre 2017.

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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