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Six pirates arrêtés dans le bassin somalien, entre Seychelles et Somalie (V6)

(B2) Six personnes, suspectées de piraterie, qui étaient à bord d'un baleinier, servant de navire-mère, et d'un skiff, ont été arrêtées après l'attaque de deux navires, les 17 et 18 novembre dans le sud du bassin somalien, a pu apprendre B2 selon un communiqué de l'opération européenne anti-piraterie déployée dans l'Océan indien (EUNAVFOR Atalanta).

Arrestation des six pirates présumés qui étaient à bord d'un petit baleinier, par l'équipe d'abordage du Virginio Fasan (crédit : EUNAVFOR Atalanta)

Entre Somalie et Seychelles

L'incident s'est déroulé entre les Seychelles et la Somalie selon nos informations, à environ 320 milles marins au sud-est de la côte somalienne, (à la hauteur de la ville de Mogadiscio). Ce qui est pour le moins nouveau ; ces derniers mois les attaques pirates se concentraient dans le Golfe d'Aden ou le long des côtes somaliennes.

Tirs au RPG

Les pirates ont commencé par attaquer le 17 novembre, le MV Ever Dynamic, un porte-conteneurs de 52.000 tonnes battant pavillon panaméen et opéré par Evergreen, qui allait de Mombasa à Colombo (Sri Lanka). Le capitaine a alors accéléré, jusqu'à 15 nœuds puis 20 nœuds, pour dérouter les pirates qui cherchaient un point d'appui pour grimper sur le navire, tout en effectuant des manœuvres, pour gêner ceux-ci. Les pirates ont visé le navire par un tir de RPG. Sans succès.

Le Galerna III visé

Les pirates ont alors abandonné et se sont dirigé vers le bateau de pêche Galerna III, un thonier de la compagnie Albacora de Bermeo battant pavillon seychellois (1) qui évoluait au large des Seychelles. La présence d'une équipe de sécurité et la mise à l'abri de l'équipage ont permis d'éviter des pertes humaines du côté des marins.

Au large de l'Ile de Mahé

Il était 8h55 heure locale samedi (18 novembre), le Galerna III se trouvait au nord-ouest de l'île de Mahé, dans les eaux internationales, lorsqu'un des trois gardes de sécurité a sonné l'alarme, raconte le capitaine Ager Zabala au quotidien El Correo. Un bateau suspect s'approchait à pleine vitesse et il n'y avait pas de temps à perdre. Selon le protocole habituel, l'ordre a été donné de 'zigzaguer', une manœuvre d'évitement classique. « Les marins sont partis se réfugier dans la pièce de sécurité », tandis que les agents de sécurité se préparaient à repousser l'agression. « Ils ont envoyé plusieurs éclairs d'avertissement quand le bateau était à environ 800 mètres. Quand ils ont vu que nous étions armés, ils ont décidé d'abandonner et sont retournés vers le navire-mère qui était aux environs », explique Ager Zabala.

Appréhendés par les Italiens

Un avion de patrouille maritime espagnol est d'abord intervenu pour localiser les pirates avant que les marins italiens de l'ITS Virginio Fasan (F-591) prennent le relais. « Le navire Fasan patrouillait à environ 60 milles marins de la côte sud de la Somalie quand une attaque de pirates a été signalée sur le porte-conteneur » relate un rapport la marine militaire. Le navire s'est alors dirigé vers le lieu de l'incident. Dans le même temps, une seconde attaque contre le navire de pêche a été signalée. Un navire suspect des pirates repéré par l'avion de patrouille maritime, l'hélicoptère de bord SH-90 du navire italien a pris le relais, permettant de repérer précisément « deux petits bateaux dans une position cohérente et corrélée avec celles des attaques ». L'équipe de fusiliers marins du bord de la brigade San Marco est alors intervenue pour arrêter les suspects. Les équipages des navires attaqués sont sains et saufs, précise-t-on à EUNAVFOR Atalanta.

Processus juridique en cours

« Le processus juridique est commencé — a indiqué l'opération européenne – afin que les pirates présumés soient transférés à une autorité compétente pour être poursuivi en justice ». Selon nos informations, ce sont les Seychelles qui pourraient, tout d'abord, être actionnées pour accepter ces suspects, en vertu de l'accord existant avec l'Union européenne. Une hypothèse d'autant plus sérieuse qu'une des attaques des pirates était dirigée contre un navire battant son pavillon.

(Mis à jour) Jugement aux Seychelles

Une indication confirmée. Les suspects ont été remis jeudi (23 novembre) aux autorités des Seychelles fin novembre. Ils ont été mis en accusation pour avoir commis un acte de piraterie » et tentative d'acte de piraterie. Ils encourent une peine allant jusqu’à 30 ans.

Un rappel à la prudence

Le QG de l'opération européenne a aussitôt lancé un appel à la prudence à tous les marins présents dans le secteur, pour qu'ils s'enregistrent lors de leur passage dans le Golfe d'Aden et l'Océan indien au MSCHOA (le centre de surveillance maritime pour la Corne de l'Afrique), et continuent d'appliquer les bonnes pratiques, inscrites dans le BMP4.

Première arrestation depuis des mois

C'est la première fois depuis plus de trois ans que des pirates sont ainsi arrêtés par une équipe européenne. La dernière arrestation dans le secteur avait été faite par la marine chinoise au printemps (lire : Trois pirates arrêtés par la marine chinoise transférés au Puntland).

Une reprise légère de la piraterie

Après trois années "creuses" (2014, 2015, 2016), l'année 2017 représente un certain frémissement de la piraterie. Selon le QG d'Atalanta à Northwood (sans tenir compte de la dernière attaque), les pirates ont mené cette année six attaques dont deux ont été couronnées de succès (bateaux piratés) et quatre ont échoué ; trois attaques ont été déjouées par les navires de guerre et deux autres évènements suspects sont signalés.

NB : notre bilan tiré de notre base de données "pirates" (alimentée par les sources maritimes) est légèrement supérieur : nous avons noté une vingtaine d'attaques (ou de tentatives d'attaques), et quatre navires piratés.

(Nicolas Gros-Verheyde)

(1) L'Intertuna III est avec le Galerna III un des thoniers espagnols battant pavillon des Seychelles. Ce qui leur permet d'échapper à la date de fermeture de la pêche au thon jaune (albacore) établie par le gouvernement espagnol.


Dernier incident grave au large du Yemen

Le dernier incident recensé dans la zone était au large du Yemen, le 24 octobre, aux petites heures de la matinée, à environ 37 nautiques au sud est de l'île de Socotra. Des pirates armés à bord de deux skiffs se sont approchés, ont tiré un dhow de pêche. Un marin a été tué et trois autres blessés. L'intervention d'un navire militaire a mis fin à l'attaque, les militaires répliquant aux tirs des pirates. Ils sont ensuite venus en aide aux pêcheurs, prodiguant des soins aux blessés, et procédant un contrôle des dommages subis par le navire. Celui-ci a pu poursuivre son voyage.


Lire aussi : Une tentative d’attaque par des pirates échoue dans le Golfe d’Aden

Mis à jour 20.11 9h avec le bilan de la piraterie, 16h avec les noms des navires, 20h avec le récit du capitaine du navire de pêche attaqué - 21.11 3h avec le rapport de la marine italienne - le 30.11 avec la remise aux Seychelles. Le détail sur l'attaque du Ever Dynamic

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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