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Zapad : un exercice russe qui ne fait pas peur aux Estoniens

(B2 à Tallinn) L'exercice Zapad organisé, par les Russes et Biélorusses, en Biélorussie, du 14 au 20 septembre, ne devrait rassembler que 13.000 hommes (selon les Russes), 100.000 selon les Lituaniens ... et les Estoniens. Une démonstration de force qui n'est pas nouvelle en soi.

Un exercice pas nouveau et souvent conçu sur un mode agressif

L'exercice Zapad est un vieil exercice de l'armée soviétique. Dans le passé, durant la guerre froide, il rassemblait déjà au-delà de 100.000 hommes jusqu'à 150.000 hommes. Après un temps d'interruption, il a été repris en 1999 (Poutine est devenu Premier ministre). Et son objectif est déjà tout autant politique (vis-à-vis des pays de l'Alliance atlantique) que militaire (pour qualifier ou, à l'inverse, déclencher de nouveaux concepts). L'exercice organisé en 1999, par exemple, avait conduit la Russie à adopter un nouveau concept de sécurité (en 2000). La thématique avait souvent trait à l'OTAN...

Un exercice tourné vers / contre l'Ouest

L'exercice Zapad 2009, dix ans plus tard, s'il ne rassemblait officiellement que 12.000 hommes (avec 900 tanks et 100 avions et hélicoptères) avait un scénario pour le moins offensif. Face à une attaque des troupes de l'OTAN, il réagissait avec une attaque simulée nucléaire contre la Pologne et la répression d'un soulèvement fomenté par la minorité polonaise en Biélorussie (lire dans le Telegraph). Rien de très pacifique ! A côté de cela, l'exercice d'aujourd'hui pourrait presque paraître champêtre.

Pas de menace directe

L'émoi face à cet exercice des autorités politiques – surtout en Pologne (1) et en Lituanie – ne semble pas partagé dans les rangs militaires ni alliés ni même des pays baltes. Le chef d'état-major estonien l'a confirmé à ses homologues alliés qui l'interrogeaient pour savoir s'ils étaient menacés. En substance, la réponse a été « Nous n'avons pas peur. Nous ne nous sentons pas menacés. Nous avons des moyens de réagir, avec des alliés prêts à nous épauler, si on était menacés. » En revanche, ce que craignent et redoutent davantage les autorités estoniennes (militaires et politiques), ce sont des attaques de basse intensité militaire, mais tout autant déstabilisante pour la vie ordinaire. Face à ces attaques hybrides, par nature, mêlant cyber attaque, désinformation, manifestations civiles sont ressenties dans des pays qui comportent une forte minorité russophone comme la "vraie" menace (lire : A Tallinn, les ministres jouent à la guerre cyber hybride).

 

(Nicolas Gros-Verheyde, à Tallinn)

(1) Pour des raisons essentiellement de politique interne qui n'échappent à aucun allié et dans la hiérarchie de l'OTAN.

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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