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Entre Européens et Américains, il n’y a pas de malentendu mais des divergences

Tambours aux rencontres de l'IHEDN (© NGV / B2)

(B2) « Avec les États-Unis, il n’y a pas de malentendu, mais des divergences de vues » a expliqué Nicole Gnesotto lors des rencontres de l'IHEDN. Pour l'ancienne directrice de l'Institut d'études de sécurité de l'UE (et actuelle présidente du Conseil d'administration de l'IHEDN), la situation a totalement changé depuis la chute du mur. « Les États-Unis ne perçoivent pas la Russie de la même façon que la Pologne ou la France. Ils ne perçoivent pas par exemple l'annexion de la Crimée comme une menace ». Certaines menaces semblent avoir ainsi disparu de l'autre côté de l'Atlantique : « l'Armée rouge ne va pas envahir la Pologne ou l'Allemagne ». L'Europe n'est plus d'un intérêt vital donc pour la sécurité américaine. Ils ont d'autres priorités : la sécurité d'Israël, le "containment de la Chine", la sécurisation des voies maritimes.

Pour Nicole Gnesotto, il y a deux sortes d'attitudes possibles.

1° Le déni. « Certains Européens sont actuellement dans une sorte de déni. Ils ne veulent pas croire que les États-Unis peuvent être dangereux pour les Européens [car ils n'ont pas les mêmes centres d'intérêt] ou que le contexte de la sécurité se dégrade. Ils persistent à croire que le Brexit n’aura pas lieu. Ils estiment qu'il ne faut surtout rien faire pour éviter que les États-Unis se désintéressent de l’Europe.... »

2° Le sursaut. Une « réaction salutaire ». Les Européens doivent combler cette absence d'Amérique, « cette incertitude, par un grand volontarisme stratégique ». Ce qui n'est pas tâche facile. Pour cela, les Français doivent résister à trois tentations. Premièrement, il ne s'agit pas de faire de la France un gendarme européen. Certes la France a des capacités, quasiment toutes les capacités, mais l'objectif est davantage psychologique, que militaire. Il s’agit de créer un gendarme collectif, de convaincre les Européens de pouvoir intervenir sur les conflits extérieurs. Il ne s'agit pas non plus de se dire que la France intervient et que les autres paient. Si c'est l'objectif, ce n'est même pas la peine d’essayer. C'est raté d'avance. Enfin, il ne s'agit pas de remplacer l'OTAN mais de pouvoir la remplacer au cas où, de pallier son absence ».

Nb : Une question fondamentale au moment où les États-Unis sont plus qu'incertains sur leur politique et que la Turquie évolue de façon pas très positive – c'est une « quasi dictature » selon Nicole Gnesotto — et dans un sens souvent contraire aux intérêts européens.

(Nicolas Gros-Verheyde, à Paris)

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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