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Deeply chagrined

Un homme sauvé par les gardes-côtes italiens et rapatrié sur Palerme la semaine dernière
Un homme sauvé par les gardes-côtes italiens et rapatrié sur Palerme la semaine dernière

(BRUXELLES2) Les spécialistes de la "chose européenne" ont vu apparaitre, dimanche, dans leurs écrans, un nouveau terme dans le verbiage européen pour qualifier un évènement tragique : "Chagrined". La Commission européenne était effectivement « deeply chagrined » à l'occasion d'un nouveau naufrage en Méditerranée.

La Commission embarassée ?

Faute de traduction en français, on en est réduit à faire de l'exégèse. La Commission européenne n'est pas préoccupée, consternée, horrifiée etc. La langue anglaise comme française compte cependant toute une série de termes pour qualifier l'émoi, l'émotion, l'horreur. Non la Commission européenne est tout simplement "chagrinée", c'est-à-dire en fait surtout embarrassée, frustrée, frappée dans son amour-propre, comme me l'a souligné un ami, fin linguiste anglophone. Ce qui traduit, de fait, plus clairement la situation qu'un simple cri d'alarme

Essai d'exégèse de la parole 'Juncker' ?

Faut-il voir dans ce message un double sens dont le président de la Commission, Jean-Claude Juncker, n'est pas avare, lui qui a toujours été adepte de la finesse du langage... ou une simple « tentative ratée d'être un peu poétique » comme le suggère, perdide (;-), mon ami-linguiste ? Personnellement, j'ajouterai une hypothèse, plus platonique : la volonté d'éviter le langage facile du "concerned", "very concerned", "deeply concerned" termes qui ont rythmé les années précédentes, repris de façon si répétitive dans les communiqués de l'ancienne Haute représentante Catherine Ashton, qu'ils en perdaient tout effet ...

A chacun son interprétation

Sur twitter, plusieurs de mes confrères s'en sont donnés à coeur joie, proposant chacun leur interprétation, souvent avec l'ironie, qui sied aux journalistes en poste auprès de l'Union européenne.

Le terme est faible pour Danny Kemp de l'AFP (anglophone)

Il permet le libre choix, pour ma confrère de l'Agence europe

Il n'est pas adapté souligne Jennifer Baker (de Vieuws)

C'est une mesure de gradation avant l'action, ironise Hughes Beaudouin (LCI / TF1)

Du côté des ONG, inutile de dire qu'on est chagriné... de voir juste du chagrin et pas de mesures !

C'est le cas à Amnesty international

comme à Human Rights Watch

(Nicolas Gros-Verheyde)

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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