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Le “Charles De Gaulle” envoie ses Rafale frapper Daech. Un acte de diplomatie navale également

Un Rafale à l'appontage sur le Charles de Gaulle (crédit : DICOD / Ministère Fr de la Défense)
Un Rafale à l'appontage sur le Charles de Gaulle (crédit : DICOD / Ministère Fr de la Défense)

(B2) Les avions Rafale embarqués sur le porte-avions français Charles de Gaulle ont effectué une première frappe sur l'Irak, a annoncé ce mercredi (25 février), le ministère français de la Défense. « Au cours de cette mission de frappe planifiée, la patrouille a détruit un camp utilisé par Daech pour entraîner des combattants dans la région d’Al Quaim, non loin de la frontière syrienne ».

Les chasseurs "gaulliens" n'auront donc pas attendu longtemps avant de passer à l'action. L'unique porte-avions français est, en effet, à pied d'oeuvre dans le golfe arabo-persique, avec son groupe aéronaval, dans l’opération Chammal, depuis lundi (23 février).

Phase d'endiguement terminée, on passe à la phase de reconquête

Pour le ministre français de la Défense, venu saluer les marins du Charles de Gaulle, lundi, cet « appui aérien aux opérations défensives et offensives de nos alliés irakien et kurde (1) a d’abord permis d’endiguer la dynamique de conquête territoriale de Daech, et de stabiliser ainsi les lignes de front ». Ce premier objectif est « atteint ». Mais « la menace persiste. (..) Gagner des batailles suffit rarement à briser l’agressivité d’un adversaire aussi déterminé. » La mission des militaires est donc désormais « de permettre aux forces irakiennes de restaurer et de contrôler leur territoire ». Cela passe - selon le ministre - par « le renseignement que nous apportons à nos alliés, l’appui aérien de nos chasseurs au- dessus de l’Irak, mais également le renforcement des capacités militaires des acteurs locaux ».

3200 hommes mobilisés

Renfort après renfort, l'engagement français dans le Golfe contre Daech (l'organisation de l'état islamique) s'est, en effet, "épaissi". Tous confondus — aviateurs, marins (sur d’autres bâtiments), et forces à terre qui assurent la formation des « forces irakiennes et des Peschmerga » (1). L'opération mobilise aujourd'hui 3200 militaires. Ce qui en fait le plus gros déploiement français en OPEX (on n'est pas loin du "4000 +" engagés en Afghanistan). Au niveau aérien, outre les engins présents du Charles de Gaulle, la France a engagé 12 avions de chasse de l’armée de l’Air (six Rafale et six Mirage 2000D), 1 avion ravitailleur C-135 FR, 1 avion de patrouille maritime Atlantique 2.

Un groupe naval franco et britannique

Le groupe d'action navale est constitué d’un état-major embarqué, du porte-avions Charles de Gaulle, du groupe aérien embarqué (12 Rafale Marine, 9 Super Étendard Modernisés et 1 Hawkeye), de la frégate de défense aérienne Chevalier Paul, du pétrolier ravitailleur Meuse et d’un sous-marin nucléaire d’attaque, qui agit en "précurseur". Il faut noter également la présence dans ce groupe d'un bâtiment britannique, la frégate anti-sous-marine HMS Kent, qui est une illustration assez concrète des accords de Lancaster House, permettant aux Britanniques de ne pas perdre la "main" en matière de porte-avions, le temps de retrouver leur navire-amiral.

Un signal politique et militaire fort...

« C’est ici un signal politique fort, qui vient conforter la détermination de la France à arrêter cette barbarie que commet Daech » a souligné, sur le porte-avions, le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian. « Le groupe aéronaval constitue une capacité rare dans le monde, et, indéniablement, une vitrine technologique autant qu’un outil de puissance. Où que vous naviguiez, votre présence n’est jamais anodine ; elle montre notre force ; elle est porteuse d’alliances et de coopérations. » 

... mais aussi un acte de diplomatie navale

Quittant sa tenue de chef des opérations, pour revêtir celle de VRP de l'industrie militaire française, le ministre en profite aussi pour adresser un message particulier à « nos partenaires émiriens, qataris et saoudiens qui sont nos plus fidèles alliés dans cette région du monde » et à l'Inde. « Dans quelques semaines, un rendez-vous majeur vous attend aussi avec l’Inde, grande puissance d’Asie, avec qui nous avons su mettre en œuvre un partenariat stratégique de grande qualité. En conduisant l’exercice « Varuna 2015 », vous serez là nos meilleurs ambassadeurs » confie-t-il aux marins du Charles de Gaulle. « Lors de vos interactions avec nos alliés, je veux que vous soyez à la hauteur des partenariats que notre pays a su tisser et souhaite développer plus encore ». De la « diplomatie navale » dans le plus pur style...

(NGV)

(1) On peut remarquer la terminologie officielle qui distingue toujours soigneusement désormais les Kurdes des autres Irakiens, comme si il y avait déjà dans les faits un Kurdistan autonome, et presque indépendant de Bagdad.

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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