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La proposition Porochenko d’une mission de paix de l’UE en Ukraine : gentiment mise de côté

(BRUXELLES2 à Riga) La proposition du président ukrainien Petro Porochenko de voir une mission européenne de police (lire : Je veux des policiers européens sur la frontière avec la Russie, dit Porochenko. Chiche ?) a, gentiment mais fermement, été éludée par les responsables européens présents à Riga (Lettonie), pour la réunion informelle des ministres de la défense. B2 a interrogé plusieurs responsables présents. La réponse est assez claire, quand on lit entre les lignes.

L'important c'est Minsk et l'OSCE

Parlant au nom de la Haute représentante de l'UE (Federica Mogherini), Maciej Popowski, le numéro 2 du Service diplomatique européen, a souligné, fort diplomatiquement, que la « priorité est de soutenir la mise en œuvre de l'accord de Minsk. Nous (= l'UE) allons fournir à l'OSCE des véhicules blindés et et de l'imagerie satellite (=pour le renseignement), ainsi que ce qu’il auront besoin. » Plusieurs Etats membres de l'UE (et de l'OSCE) devraient fournir ainsi des éléments d'observation.  Et d'ajouter « Nous avons déjà en Ukraine des conseillers européens pour aider à la reconstruction des capacités de police (NB : la mission EUAM Ukraine). Nous devons en savoir plus sur la demande ukrainienne, il faut un débat ».

Quand on signe un accord, on ne prévoit pas d'alternative

Une manière de répondre par la négative à la demande ukrainienne mais aussi de souligner que ce n'est pas la question aujourd'hui. Le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a été clair. « Les accords de Minsk prévoient que l'OSCE déploie 400 observateurs pour assurer le respect » de ceux-ci. « La position du ministre de la Défense est qu'il faut un respect intégral de Minsk II. Quand on a signé un tel accord, quand est dans la volonté de respecter intégralement cet accord, on ne prévoit pas d’alternatives ».  Et d'ajouter « si des demandes existent, elles doivent être faites dans le cadre de ces accords ». 

Une mission de l'UE, un point de désaccord

Les accords de Minsk prévoient « le cessez-le-feu, le retrait des armes lourdes et un dialogue politique » a expliqué à B2 un diplomate. « Ce n'est pas le moment d’ajouter de nouveaux éléments (qui peuvent être une source) de désaccord. Ce n'est pas à l’agenda. »

Commentaire : en faisant cette demande de mission européenne, Petro Porochenko, a voulu mettre en avant tout de suite, une solution de repli qui aurait pu être effectivement, sous la table, en cas de non-respect de l'accord de Minsk. Pour certains diplomates, il s'agit surtout d'une façon de masquer ce qui, au plan militaire, est une défaite autant tactique que stratégique : les militaires ukrainiens quasi-encerclés n'ayant eu d'autre choix que de se retirer, laissant Debaltseve aux mains des séparatistes russes. Une "prise" considérée au plan européen comme de l'OTAN, officiellement, comme une violation formelle du cessez-le-feu. Mais, dans la plus pure "realpolitik", plusieurs observateurs soulignent que cela règle un "point" de crispation. Point de vue presque partagé du côté de l'OTAN, où le commandant adjoint des forces en Europe (DSaceur) le général Bradshaw souligne qu'il faut voir maintenant s'il y aura d'autres avancées des séparatistes. Autrement dit Debaltseve, c'est du passé

(Nicolas Gros-Verheyde)

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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