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Un Kosovar serbe « modéré » arrêté par les forces EULEX. Dossier (très) sensible (MAJ)

(Crédit : Belgrade Security forum)
(Crédit : Belgrade Security forum)

(BRUXELLES2) L'arrestation de Oliver Ivanovic pour crimes de guerre par le bureau des procureurs européens du SPRK, annoncée par la mission EULEX Kosovo ce lundi (27 janvier), a retenti comme un coup de tonnerre à Belgrade, comme à Pristina ou Bruxelles.

Oliver Ivanovic est suspecté « dans le cadre d'une enquête en cours sur les crimes de guerre et sur des allégations d'assassinat aggravées après le conflit », selon la mission EULEX. Les faits se seraient produits entre 1999 et 2000. Ivanovic faisait alors partie des "gardiens du pont" de Mitrovica qui bloquait la ville en deux. Il est notamment accusé d'être impliqué dans le meurtre de dix kosovars albanais à Mitrovica Nord en 2000. L'arrestation a été sans trouble. L'accusé s'est « présenté volontairement » lundi matin (28 janvier), vers 11h, au poste de police de Mitrovica Nord, « suite à un arrangement entre son avocat et le procureur spécial du Kosovo », précise-t-on à la mission Eulex. Après plusieurs heures d'interrogatoires, un mandat d'arrêt a été émis par le procureur vers 19h. Mardi (28 janvier) au matin, un juge européen d'Eulex a ordonné « un mois de détention provisoire » pour l'ancien secrétaire d'Etat serbe.

Mais Ivanovic, ingénieur de formation et ancien député du parti de l'ancien président Boris Tadic, est aussi le leader du parti local serbe  “ Initiative civique SDP (Liberté, démocratie, justice’), un parti plutôt modéré qui prône la réconciliation entre Serbes et Kosovars. Et sa mise en détention, alors que se tend la situation sur le terrain, comme dans les couloirs diplomatiques à Bruxelles, ne fait rien pour apaiser la tension.

La goutte de trop !

Depuis le mandat d'arrêt émis contre lui à 19h, les réactions se multiplient : manifestations à Mitrovica-Nord, réaction du Premier-ministre serbe, menace de démission des membres des assemblées locales... La vice-présidente du Parti Initiative civique, Ksenija Bozovic, dénonce une arrestation « sur fond politique ». « Si quelque chose qui s'est produit il y a 14 ans, et qu'on convoque un homme seulement maintenant, c'est un peu contestable » fait-elle remarquer. Candidat malheureux des élections municipales de novembre, Olivier Ivanovic avait, selon elle, l'intention de se porter candidat de nouveau aux prochaines élections... Et la date limite de candidature est fixée à mercredi (29 janvier). Pour Bozovic, ce n'est pas une coïncidence. Une délégation composée des représentants serbes du Nord du Kosovo est venue d'ailleurs demander à 20h, à EULEX, la libération du politicien. Des manifestations se sont improvisées pour, finalement, se disperser vers 22h. Mais de nouvelles actions sont prévues dans les prochains jours. A la télévision publique serbe, TPC, on s'en prend à EULEX, accusé de tous les maux.

Des négociations toujours difficiles à Bruxelles

Du côté du gouvernement serbe, c'est l'incompréhension qui domine également. Le Premier ministre serbe s'est dit  « surpris » de cette arrestation, alors qu'il siégeait à Bruxelles pour le 21e round du dialogue Pristina-Belgrade. « Le mouvement est plutôt négatif »  a t-il affirmé « Nous espérons que cela n'affectera pas les prochaines élections dans la partie nord de Mitrovica, le 23 Février » a t-il ajouté. Les récents troubles dans la ville et la mort d'un élu local serbe, il y a une semaine, avaient déjà fait monté la pression d'un cran. Ce qui ne va pas faciliter le dialogue Pristina Belgrade, placé sous la houlette de la Haute Représentante de l'UE, Catherine Ahston, qui achoppe toujours sur la question des municipalités et notamment de Mitrovica-Nord.

(MAJ 5.2.2013) Un panel de juges de la Cour d'appel de Pristina a confirmé la décision du tribunal de première instance de Mitrovica, de le garder en détention un mois de plus, et refusé la demande de remise en liberté de Oliver Ivanovic. Les juges estiment qu'il y a un « risque substantiel que l'accusé puisse fuir » ou « puisse intimider des témoins ».

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Loreline Merelle

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