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Une attaque “blue on blue” sur la Commission

La patrouille de France dessine un "60" en guise d'anniversaire. Et non pour célébrer le critère de 60% maximal de dette :-) (crédit : Ministère de la Défense)
La patrouille de France dessine un "60" en guise d'anniversaire. Et non pour célébrer le critère de 60% maximal de dette 🙂 (crédit : Ministère de la Défense)

(BRUXELLES2) En termes militaires, on appelle cela une attaque "blue on blue". Un tir fratricide ! Jusqu'à présent, la Commission européenne se refusait à reconnaitre toute erreur dans la politique économique imposée à la Grèce. Encore hier, un des portes-paroles de l'exécutif européen, se refusant à répondre à certaines critiques de la presse, me répondait : « nous sommes occupés à travailler sur les solutions de l'avenir pas à refaire l'histoire ». Le coup est parti de Washington, d'une institution qu'on ne peut pas soupçonner d'un gauchisme effréné : le FMI. Dans un rapport qui a percé au public et analyse "ex post",  l'accord de 2010, le Fonds monétaire international revient, en effet, sur ses propres erreurs et celles de la Troika. Il met clairement en cause l'équipe de Olli Rehn, qui avait peu d'expérience de la gestion de crises et était un "brin" dogmatique...

Zéro expérience de la gestion de crises

Les domaines d'expertise et d'expérience diffèraient au sein de la Troïka. Certes les institutions européennes ont « apporté une vision intégrée à l'étude de l'économie grecque et ont souligné l'ampleur des retombées possibles au sein de l'Europe » ; un point de vue qui n'était pas celui « adopté par le Fonds qui était plus habitué à analyser les problèmes avec un focus spécifique au pays concerné » reconnait le rapport. Mais il pointe les faiblesses européennes. « La Commission européenne a tendu à établir des positions de principe par consensus, a connu des succès limités dans la mise en œuvre de la conditionnalité au titre du Pacte de stabilité et de croissance et n'avait aucune expérience de la gestion de crises ».

Une Commission plus intéressée par le respect des critères de Maastricht que la croissance

« Tandis que le (FMI) avait l'expérience de l'ajustement budgétaire, la CE avait ses propres objectifs budgétaires de Maastricht. (...) La Commission mettait davantage le focus sur les réformes en lien avec le respect des normes de l'UE que sur l'impact de la croissance. Ce qui n'a pas beaucoup contribu(é) à l'identification croissance des réformes structurelles. Dans le secteur financier, la Banque centrale européenne avait un intérêt évident à prendre les devants mais n'était pas experte en matière de supervision bancaire où le Fonds disposait des connaissances spécialisées. »

Une troika un peu "bazar"

« Il n'y avait pas de répartition claire des responsabilités au sein de la Troika » Si entre la Banque mondiale et le FM, il existe une répartition des tâches, avec la Commission européenne, cela semblait plus compliqué. « Les trois instituions avaient des procédures internes différentes et la documentation "programme" était volumineuse, doublonnait, et sujette à différents degrés de secret. Malgré tout, la coordination semble avoir été assez bonne, vu les circonstances » écrivent les auteurs du rapport non sans humour.

Télécharger le rapport "Ex-Post evaluation of exceptional access under the 2010 Stand-By arrangement" RapGreceEcoEval@FMI130520 (page 31 sur la troika)

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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