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Un pas en avant, un pas de côté, un pas en arrière

La négociation sur la levée du secret bancaire est une valse à trois temps.

Le premier est l’exclamation. « 1000 milliards d’euros perdus par an ! » s’exclame Barroso.

Le second celui de la charge « il faut le récupérer » entonnent les Chefs d’Etat. « l’impunité est terminée » tonne François Hollande à la fin du sommet européen : « Ceux qui pensaient échapper à l’impôt en se réfugiant dans les paradis fiscaux doivent comprendre que l’opacité est finie ».

Puis vient le troisième temps, celui du tempo sur le mode piano. C’est le Premier Ministre luxembourgeois qui joue, en général, le jeu, en duo avec son homologue autrichien. « Oui. Nous allons abandonner le secret bancaire et nous diriger vers l'échange automatique d'informations, que nous voulons introduire le 1er janvier 2015» a ainsi juré à Bruxelles, mercredi dernier, l’inoxydable Jean-Claude Juncker. « Mais » cela se fera « à condition d’avoir des négociations avec les pays tiers, dont notamment la Suisse ». Roué aux sommets, Juncker sait bien que le temps passe, la fermeté peut s’émousser. Derrière les grands élans se cachent déjà des petits compromis.

Le sommet des « 27 » qui a duré 4 heures, tout mouillé, énergie et Syrie compris, a d’ailleurs tenu plus du « gouter » que d’une réunion de travail. Et ses conclusions ne sont pas aussi farouches que les déclarations vibrionnantes d’après réunion. Quelques rendez-vous sont bien pris. Mais rien ou peu sur la base consolidée de l’impôt sur les sociétés. Et pas de liste unique des paradis fiscaux. La plupart des engagements sont surtout de bonne volonté. « C’est un coup épée dans l’eau. Les Chefs d’État et de gouvernement ont surtout fait de la com’ » constate Philippe Lamberts, eurodéputé et spécialiste des banques chez les Verts.

Ceux qui ont de la mémoire se souviendront du cri de victoire en 2003, quand la directive sur l’épargne avait été adoptée… au bout de 14 ans de négociation. Le Luxembourg et l’Autriche, déjà !, comme la Belgique alors, avaient obtenu de ne passer à l'échange automatique d'informations que « si et lorsque le Conseil aura conclu "à l'unanimité", un accord avec la Suisse » et consorts. Condition qui n’est pas encore effective.

Le « je te tiens, tu me tiens par la barbichette » continue.

(NGV)

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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