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Balkans

Belgrade et Pristina scellent leur accord sur le nord du Kosovo

Le Protocole d'Accord Belgrade-Pristina sur le nord du Kosovo paraphé (Crédit : B2 / EBS)

(BRUXELLES2) Le moment est "historique". Ce mot est si souvent galvaudé qu'on n'ose l'utiliser. Mais c'est la réalité. Et pour le service diplomatique européen, sa chef, Catherine Ashton, et l'Union européenne, c'est incontestablement un succès. Belgrade et Pristina ont décidé de mettre fin à la guerre des mots et des pouvoirs, voire plus, qui les opposait depuis 2008 et la déclaration d'indépendance de l'ancienne province serbe, voire depuis 1999 où, sous protection de l'OTAN, le Kosovo avait obtenu une autonomie de fait de la Serbie.

Tout cela sous l'égide de négociations menées sous l'égide de Bruxelles, avec la complicité active de certaines capitales, notamment de Berlin ; en posant à l'été 2011, un réel ultimatum à Belgrade - avant toute décision sur le processus d'adhésion de la Serbie, celle-ci « doit démanteler les structures parallèles dans le nord du Kosovo » - la chancelière Angela Merkel a assurément mis la pression.

Si cet accord est respecté, c'est ainsi un des derniers points noirs de l'Europe - après le nord de l'Irlande et le pays basque - qui devrait être pacifié. Il restera encore la Transnistrie, l'Ossétie-Abkhazie et le Nagorno Karabakh. Mais cela est un peu plus loin...

Un conflit qui n'a pas été que verbal

Plusieurs personnes y ont perdu la vie. Citons (récemment) : un habitant albanais tué par un engin explosif en avril 2012 ; un Serbe pris à partie en novembre 2011 (lire : Incident grave au nord Kosovo, 1 mort, 3 blessés, Eulex enquête) ; un policier kosovar en juillet 2011 lors de l'attaque des postes frontières (lire : Flambée au nord du Kosovo) ; un policier ukrainien de la MINUK mort en mars 2008 lors d'affrontements violents entre des manifestants serbes et les forces internationales où de nombreux soldats de la KFOR furent également blessés (lire : 3 nouvelles condamnations au Kosovo du nord)...

Cette signature est un poids en moins pour les deux parties comme pour les Européens

La déclaration de Catherine Ashton, un peu avant 17h, venue devant les portes du Service diplomatique européen (il n'y a pas de perron) annoncer que les négociations entre Belgrade et sont bel et bien « conclues » est donc un soulagement pour tout le monde. Le nord du Kosovo, peuplé en majorité de Serbes, restait en effet une épine dans le pied à la fois pour Pristina - qui ne pouvait assurer son autorité dans le nord - que de Belgrade - qui se voyait empêché de commencer sa route d'adhésion vers l'Union européenne - comme des Européens et de l'OTAN - qui devaient maintenir sur un petit territoire de km2 une présence militaire et policière importante face à une situation instable qui pouvait dégénérer à tout moment. Et lundi, les ministres des Affaires européennes des 27 pourraient ainsi donner leur feu vert de principe à l'entrée de la Serbie dans le processus d'adhésion à l'Union européenne.

Tout n'est cependant pas encore réglé

Il va falloir que chacun des Premiers ministres concernés aille soutenir devant ses supporters et son opinion publique qu'il n'a rien cédé et que l'accord est bon pour leur peuple. Certains détails doivent encore être précisés. Il faudra voir aussi comment le nord du Kosovo réagit à cet accord. De façon formelle, Hashim Thaci et Ivica Dacic se sont d'ailleurs bien gardés de signer l'accord en commun. Ni même de le signer tout court. Il s'agit bien d'un "paraphe", de la fin d'une négociation, et non d'une signature en bonne et due forme. C'est d'ailleurs de façon séparée que le Kosovar et le Serbe sont venus "parapher", dans une salle séparée, avec C. Ashton, ce protocole d'accord qui existe en deux exemplaires. Mais qu'importe. Comme l'a rappelé la Haute représentante de l'UE, « le texte a été paraphé par les deux Premiers ministres. Je tiens à les féliciter pour leur détermination durant ces mois, et le courage qu'ils ont montré. C'est très important, un signe pour s'éloigner du passé et pour tous deux se rapprocher étroitement de l'Europe ».

Les différentes dispositions de l'accord ainsi que le déplacement à l'OTAN sont détaillées pour les abonnés du Club de B2.

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Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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