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Les Français aiment l’armée quand elle s’européanise et… quand elle défend les intérêts français

(BRUXELLES2) C'est un paradoxe. Généralement les militaires ne jurent que par leur drapeau, regardant avec méfiance tout partage, mise en commun ou mutualisation. Dans la population, la tendance est plutôt inverse. C'est le principal enseignement d'un sondage (*) réalisé par l’Ifop pour Acteurs publics et Ernst & Young (*). Dans le cadre la réforme du Livre blanc, les Français sont ainsi à 90% d’accord avec l’idée d’intensifier les « efforts de collaboration entre les armées européennes » (37% totalement pour, 53% plutôt d’accord). Avec seulement 2% totalement contre, on pourrait presque parler d'un quasi plébiscite ! Ils sont aussi une nette majorité (79%) à vouloir réviser la politique d'intervention extérieure de l'armée française (79%) comme de moderniser les équipements de l'armée (80%) ou de soutenir l'industrie française de défense (83%). On est ainsi dans une posture socialo-gaulienne, révisée Monnet, si on peut dire 🙂

Du point de vue des priorités affectées par les Français à la politique de défense, la protection des intérêts vitaux du pays (52 %) est en tête suivi (à 32 %) de "la participation à la stabilité et à la protection du territoire européen avec nos partenaires". Un fort clivage d'âge traverse cet objectif européen de la politique de défense française : il n’est mentionné que par 25 % des plus jeunes et s'élève rapidement chez les adultes dans la vie active (73% chez les 25-34 ans, 69% chez les 35-49). Mais c'est chez autour de 60 ans et plus qu'il culmine à 80%. La défense des intérêts vitaux du pays est segmenté selon un axe droite - gauche : nettement majoritaire à l'extrême droite (91%), il décroit ensuite lentement jusqu'au Front de gauche (60%) ; les sympatisants PS, Modem et UMP étant sur une trajectoire sensiblement identique (70%, 71% et 78% respectivement). L’envoi de forces d’intervention humanitaire à l’étranger ne recueille pas un fort assentiment (13%) et là aussi on retrouve une segmentation politique marquée, mais inversée par rapport à l'assertion précédente : les sympatisants du front de gauche sont nettement pour (54%) et la courbe descend lentement sur qu'aux sympatisants de l'extrême droite (11%).

Sur le budget de la Défense, les Français sont partagés à 50/50 sur la capacité de l’État à bien gérer ces dépenses importantes : 49 % estiment ainsi que l’argent public consacré à la défense nationale est utilisé de manière efficace, une proportion comparable (51 %) considère l’inverse. Un chiffre à relativiser cependant selon Damien Philippot, 
directeur des études politiques de l’Ifop. Une étude de Acteurs publics parue en janvier sur la politique du logement, ne donnait que 18 % d’interviewés positifs. Alors 50% c'est déjà un bon résultat.

Dernier segment du sondage, les recommandations possibles du livre blanc, 90 % adhèrent à l’idée d’une collaboration plus intense avec les armées européennes, 79 % considèrent qu’il est nécessaire de réviser la politique d’intervention extérieure de l’armée française et 64 % souhaitent que l’on réduise les implantations hors territoire national et que l’on continue de fusionner les bases existantes.

(*) Sondage Acteurs publics/Ernst & Young réalisé par l’Ifop pour l’Observatoire des politiques publiques auprès d’un échantillon de 1 008 personnes représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas (sexe, âge, profession de l’interviewé) après stratification par région et catégorie d’agglomération. Les interviews ont eu lieu par questionnaire auto-administré en ligne (CAWI - Computer Assisted Web Interviewing) du 12 au 14 février 2013.

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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