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La mission EULEX Kosovo : pas assez efficace ! L’Etat kosovar « limité » (Cour des comptes)

(BRUXELLES2) L’aide de l’Union européenne au Kosovo, notamment sous la forme de sa mission d’assistance à l’Etat de droit (EULEX), n’est pas suffisamment efficace dans sa lutte contre le crime organisé et la corruption, a estimé la Cour des comptes européenne dans un rapport qu'elle vient de publier. Alors que la mission civile la plus importante de l’Union européenne a fêté ses 3 ans en avril dernier, la Cour des comptes constate que «bien que l’UE ait contribué au renforcement des capacités (...) l’aide apportée dans les domaines de la police et de la justice n’a donné lieu qu’à des succès modestes». Bref, le niveau de la criminalité organisée et de la corruption reste élevé. D’autant plus que le Kosovo demeure le principal bénéficiaire au monde de l’aide européenne. L'Union européenne a versé 212,70 millions d'euros en 2011 ; 1212 millions d'euros en cinq ans ont ainsi été dépensés.

Un manque de volonté politique des Kosovars

L’ingérence politique, le manque d’efficacité et de transparence tout comme la non-application de la loi constituent les fils rouges du rapport. Auxquels viennent s’ajouter une capacité « limitée » des autorités nationales dans la protection de témoins et des difficultés à les réinstaller à l’étranger. Quant au Nord du pays, les résultats sont «quasiment nuls». Depuis 2008, aucun juge local n’a pu y travailler. Des blocages réguliers sur les routes compliquent la mobilité et la tâche des forces européennes. Des Cours locales y jugent d’ailleurs toujours selon la loi serbe, même si celles-ci sont contestées par Pristina. A la source de tous ces maux, les membres de la Cour des comptes dénoncent en premier lieu un manque de volonté politique, mais également des capacités financières chétives et une société civile trop effacée. Pour Gijs de Vries, en charge du rapport et ex-coordinateur de la politique anti-terrorisme de l'UE entre 2004 et 2007, «les autorités kosovares n’accordent pas suffisamment d’attention à l’Etat de droit». Plusieurs cas avérés ont montré que, faute de volonté politique, rien ou presque n’avait été fait afin de coordonner les forces de police kosovares avec les autorités judiciaires. Exemple explicite, il n’existe pas de base de donnée commune aux deux entités. Résultat, l’un ne sait pas lorsque l’autre procède à des investigations, et vice-versa.  Mais la faute vient également de Bruxelles.

Un manque de coordination des structures européennes

La Commission et le Service européen d'action extérieure (SEAE) sont pointés du doigt. Les objectifs et les besoins de la mission n’auraient pas été correctement évalués lors de la phase de planification. Aujourd’hui encore le manque de coordination entre la Commission et la mission détournent de possibles progrès plus substantiels, explique le rapport. Le rapport souligne également des lacunes humaines. Les Etats membres n’auraient pas envoyé suffisamment de personnel et auraient envoyés ceux-ci pour des périodes trop courtes. Le rapport étaye que les juges européens sont ainsi trop absorbés par leur travail exécutif de juge afin de pouvoir allouer suffisamment de temps à la reconstruction des capacités judiciaires. Certains d'entre eux ne seraient pas non plus suffisamment qualifiés.

L'incitatif de l'adhésion ne fonctionne pas

Contrairement aux autres pays des Balkans, l’incitatif de l’adhésion ne fonctionne pas comme il le devrait au Kosovo. L’absence de position européenne commune vis à vis de la reconnaissance du pays condamne les autorités kosovares à ne pas «mordre à l’hameçon». Les membres de la Cour des comptes proposent donc de jouer sur la libéralisation des visas, en se focalisant tout d’abord sur les points prioritaires. La nomination de davantage de juges par exemple. La Commission et EULEX avaient procédé à la recommandation de certaines personnes aux postes juridiques du pays. Encore une fois, la faute à un manque de détermination de la part du gouvernement kosovar, 28% des postes sont restés vacants puisque 31 des candidats potentiels n’ont jamais été nommés par le gouvernement.

Avoir une diplomatie plus conditionnelle

De manière générale, le dialogue entre tous les organes européens et le Kosovo devrait nécessairement garder en tête la consolidation de l’Etat de droit dans le pays, à l’image de la politique de «dialogue structurel sur l’Etat de droit» mis en place au niveau politique au printemps dernier. Et l’UE pourrait tirer profit de davantage de diplomatie conditionnelle dans ses rapports avec le Kosovo. Par exemple, la Cour préconise d’insister au niveau politique pour une simplification des organes judiciaires du pays. A l’heure actuelle, 3 entités anti-corruption se chevauchent sans qu’aucune des trois ne dispose de réel pouvoir. La Cour des compte recommande également au SEAE de travailler d’ores et déjà sur une stratégie de sortie pour la mission EULEX. Enfin, pour la Cour, il serait bon de doter les missions de l'UE déployées dans le cadre de la PeSDC de la personnalité juridique.

A noter tout de même que le rapport de la Cour reconnait des résultats substantiels en ce qui concerne le travail de la douane nationale.

Télécharger le rapport de la Cour des comptes (en anglais)

Rédaction de B2

© B2 - Bruxelles2 est un média en ligne français qui porte son centre d'intérêt sur l'Europe politique (pouvoirs, défense, politique étrangère, sécurité intérieure). Il suit et analyse les évolutions de la politique européenne, sans fard et sans concessions. Agréé par la CPPAP. Membre du SPIIL. Merci de citer "B2" ou "Bruxelles2" en cas de reprise

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