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Green on blue, une réunion des ministres de l’OTAN dans la morosité ? (maj)

(BRUXELLES2) Après l'enthousiasme issu du sommet de la Chicago, la réunion des ministres de la Défense de l'Alliance se place, ces mardi et mercredi (9 et 10 octobre), sous un signe plus morose. Que ce soit au niveau des projets de la Smart Défense - qu'il va falloir dynamiser - ou de la situation en Afghanistan - pas mirifique malgré l'optimisme volontariste du secrétaire général - le temps n'est pas aux grands élans de générosité. Le premier sujet (dans l'ordre chronologique) est la mise en oeuvre du paquet de défense défini à Chicago, avec l'objectif de garder la Smart Défense « sur les rails » comme l'écrit le secrétaire général A.F. Rasmussen dans sa lettre d'invitation que nous avons pu consulter. Les envoyés spéciaux feront ainsi rapport des progrès faits depuis le dernier sommet, et les ministres devront se positionner « sur les projets futurs et s'avancer dans la phase de mise en oeuvre ».

Bien dépenser plus qu'important que dépenser tout court

Second sujet : avoir une meilleure des capacités de chaque Etat. C'est nécessaire pour « résoudre les lacunes de façon plus efficace » et fournir un « tableau clair dans le contexte des dépenses nationales ». L'objectif est de renforcer le processus de planification de défense de l'OTAN. Les chiffres (dépenses et recettes, inputs et outputs) doivent montrer « non seulement comment les nations dépensent pour la défense mais aussi les effets de ces dépenses (...) Il est important non seulement de dépenser au bon niveau mais aussi de dépenser pour les bonnes capacités » écrit le secrétaire général. Un changement de paradigme évident. L'objectif fixé de 2% du PIB consacré aux dépenses de défense est fracassé dans la plupart des pays de l'Alliance, du moins sur le continent européen.

Coté opérations

L'Afghanistan constituera le plat central de la seconde journée (le 10 octobre), consacrée aux opérations. La montée des attaques "green on blue" (policiers ou militaires afghans sur leurs homologues de l'ISAF) inquiète tous les membres. Certaines patrouilles communes sont suspendues tout comme certaines formations. Et les volontés de retirer plus vite certaines troupes semble bien réel, dans la plupart des capitales, Londres y compris. Mais le secrétaire général de l'Alliance reste inexorablement optimiste « L'ISAF est sur la voie du succès comme défini à Lisbonne et Chicago. » La transition est en bonne voie. « 75% de la population afghane vit actuellement dans des zones où les forces de sécurité afghanes ont le commandement ». L'enjeu est maintenant aussi de réussir la sortie d'Afghanistan.

La mise en place de la nouvelle mission de l'OTAN après 2014 - davantage centrée sur la formation - reste de mise. Mais le contexte - à la fois sécuritaire dans le pays et budgétaire dans chaque Etat participant à l'opération - n'est pas porteur. On saura dans cette réunion si l'exemple des Canadiens — qui n'envisagent pas de proposer des forces après leur départ des militaires - sera suivi ou non. Le travail de planification est en cours. Et la directive initiale (NAC initiating directive), qui fixe les grandes lignes d'orientation politiques de la mission, doivent être approuvés formellement lors de la réunion. Cette directive a été élaborée au sein des ambassadeurs. Suivra ensuite l'élaboration d'un CONOPS et un plan d'opération d'ici l'été. Tandis qu'un SOFA - accord de protection des forces - devra être négocié avec les autorités afghanes avant l'entrée en fonction de la nouvelle mission (début 2015). Autre point important, la coordination entre les Alliés et l'Union européenne. Le secrétaire général de l'OTAN appelle à une "coopération étroite" entre les deux organisations, et devrait demander à Catherine Ashton, la Haute représentante d'appuyer dans ce sens.

Le Kosovo constituera l'autre aspect opérationnel de cette journée. Avec la volonté de plusieurs pays de reprendre la diminution des effectifs de la KFOR interrompu à l'été dernier. Si la barre des 8.000 hommes déployés reste la théorie, dans la pratique, il restera inférieur, nombre de pays maintenant leurs forces "off shore" dans leurs casernes. La réserve italienne ou germano-autrichienne déployée un temps, devrait ainsi rester au pays, prêt à intervenir. Cette force de réserve servant également de force de réserve pour la Bosnie-Herzégovine. Ce qui est, somme toute logique.

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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