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Réunion d’urgence sur la Syrie, bd Leopold (Maj2)

(BRUXELLES2) C'est une réunion de crise, comme l'organisation en a peu connu ces dernières semaines. Le conflit syrien a fait irruption ce soir à l'Alliance atlantique. Une réunion d'urgence des ambassadeurs des 28 (le NAC ou Conseil de l'Atlantique Nord) a, en effet, été convoquée, suite au bombardement syrien en territoire turc qui a fait 5 morts (1 femme et ses 4 enfants) et 9 blessés dans la localité frontalière d'Akçakale. Une réunion placée sous l'article 4 du Traité (consultation en cas de menace (*)) et non sous l'article 5 (clause de solidarité). Ce n'est en effet pas la première fois que cette localité était visée. Un premier tir d'obus avait eu lieu le 26 septembre dernier détruisant une maison. Et les Turcs - comme la plupart des alliés - entendaient 'marquer le coup' pour éviter une nouvelle fois...

Condamnation de l'acte agressif

Entamée à 21h30, la réunion devrait se terminer très rapidement, selon les dernières informations obtenues au QG de l'Alliance. Le représentant turc a informé ses autres collègues de la situation, selon mes dernières informations. Et les ambassadeurs ont exprimé leur soutien à la Turquie, condamnant vivement cette "violation du droit international". Un projet de déclaration des 28 a été approuvé, condamnant fermement « l'agression » de la Syrie qu'elle considère comme une « violation flagrante du droit international »  et soutenant la Turquie. Lors de la réunion, plusieurs alliés ont d'ailleurs salué la réponse mesurée turque qui a visé des cibles syriennes militaires uniquement.

Voici le texte publié à l'issue de la réunion :

Comme indiqué le 26 juin 2012, l’Alliance continue de suivre de près la situation en Syrie. Au vu des agressions perpétrées récemment par le régime syrien à la frontière sud-est de l’OTAN, qui constituent une violation flagrante du droit international et qui présentent clairement un danger immédiat pour la sécurité de l’un des membres de l’Alliance, le Conseil de l’Atlantique Nord s’est réuni aujourd’hui, dans le cadre de l’article 4 du traité de Washington, pour parler des bombardements incessants effectués par les forces du régime syrien en Turquie, à proximité de la frontière turco-syrienne.

Le dernier bombardement, le 3 octobre 2012, qui a causé la mort de cinq citoyens turcs et en a blessé beaucoup d’autres, est une source de vive préoccupation pour tous les Alliés, qui condamnent fermement cette attaque.

Dans l’esprit de l’indivisibilité de la sécurité et de la solidarité découlant du traité de Washington, l’Alliance reste aux côtés de la Turquie et exige l’arrêt immédiat de telles agressions dirigées contre un Allié, et elle demande instamment au régime syrien de mettre fin aux violations flagrantes du droit international.

Le précédent de juin

Le conseil des ambassadeurs de l'Alliance s'était déjà réuni lors de la destruction en vol d'un avion turc par la DCA syrienne, fin juin. Aucune suite n'avait vraiment été donnée après une déclaration de condamnation (lire : Avion turc abattu : l’OTAN condamne et observe). Et pour cause... Selon certaines informations, le dossier transmis par les Turcs à leurs alliés était "léger". De source militaire, on précisait alors que le tir qui a atteint l'avion turc démontrait sa très forte proximité avec la Syrie. En bref, il avait violé l'espace aérien syrien. Ce qui constitue une faute grave en droit international, surtout en période de tension. Et celle-ci pouvait être en droit de répliquer, voire d'abattre l'appareil si elle l'estimait "hostile", car pouvant viser des intérêts stratégiques nationaux. Il existe d'autres méthodes pour faire face à une telle menace, par exemple l'accompagnement hors du sol. Mais le délai imparti était très court (il aurait fallu que des avions syriens décollent...). En clair, si la Turquie était en droit d'informer ses alliés de l'incident, elle pouvait savoir fort bien qu'aller trop loin risquait de se retourner contre elle.

Dans le cas soumis, aujourd'hui, les faits sont plus clairs et laissent planer moins d'ambiguité sur une "provocation" turque.

Lire également :

(*) Article 4 : « Les parties se consulteront chaque fois que, de l'avis de l'une d'elles, l'intégrité territoriale, l'indépendance politique ou la sécurité de l'une des parties sera menacée. »

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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