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L’opération Ocean Shield en peine de navires

(BRUXELLES2) On avait sur ce blog commenté les lacunes capacitaires de l'opération anti-piraterie de l'UE (EUNAVFOR Atalanta) au début de l'année. Obstacles surmontés. Mais sa petite soeur de l'OTAN, "Ocean Shield", est aussi à la peine. Et de manière plus accrue et, semble-t-il, plus durable. L'opération anti-piraterie de l'OTAN végète en effet, actuellement avec seulement quelques navires - actuellement 3 voire 2. Taillée sur mesure pour la marine turque et danoise, elle continue de bénéficier d'un soutien régulier de ces pays : un ou deux navires turcs et la moitié de l'année d'un navire danois. Mais c'est à peu près tout...

Les autres alliés ont d'autres chats à fouetter et quand ils peuvent mettre un bateau de disponible, ils le mettent dans d'autres opérations - EUNAVFOR notamment - ou en bilatéral. Les Américains, eux-mêmes, semblent avoir d'autres priorités dans la région - avec notamment l'Iran - ou plus loin la Corée et la Chine. Et ils soutiennent déjà une autre opération, montée à leur initiative, la CTF 151. Quant aux Britanniques, la question est plus crue. Sous pression budgétaire constante, la flotte de Nelson est priée de bien cerner ses engagements ; elle ne dispose ainsi dans tout l'Océan indien que d'un seul navire en permanence. Et, là encore, la situation dans le détroit d'Ormuz requiert davantage son attention que la lutte contre la piraterie...

La logique opérationnelle et rationnelle commanderait de fermer cette opération en renforçant l'une ou l'autre des coalitions internationales. Mais il faudrait trouver une solution pour associer les marines turque et danoise, ou canadienne à l'opération européenne, par exemple. Ce qui n'est pas évident - le processus d'association de partenaires extérieurs à des opérations de l'UE est plutôt lourd. Et il se heurte à deux obstacles politiques de taille : l'opt-out danois en matière de défense d'une part ; le blocage turco-chypriote qui trouble les relations OTAN-UE de l'autre (et ce n'est pas près de changer sous présidence chypriote, sauf initiative de dernière minute). Pour un pays, comme la Turquie, cette opération - comme l'opération Active Endeavour - permet aussi de continuer à faire croiser des navires dans une zone régionale qu'il considère stratégique, sous un objectif louable (la lutte contre la piraterie ou la lutte contre le terrorisme). Enfin, la logique interne d'une organisation comme l'OTAN ne pèse pas en ce sens. Ce n'est jamais "facile de fermer une opération" explique un diplomate en poste à l 'organisation.

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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