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Ne faut-il pas réécrire Dayton ?

(BRUXELLES2) Réécrire Dayton ? La question peut paraître taboue tant les accords de Dayton signés en 1995 apparaissent encore aujourd'hui comme une garantie de la paix en Bosnie-Herzégovine. Négociés et signés il y a plus de quinze ans, dans un contexte de guerre, où le plus important était de faire taire les armes, ils paraissent cependant aujourd'hui quelque peu inappropriés et surtout difficiles à appliquer dans un contexte qui nécessite à la Bosnie de faire une série de réformes sur le chemin de l'intégration européenne.

Morcellement institutionnel des compétences = blocage

Ces accords et la Constitution bosnienne, qu'il contient en annexe, ont légitimé l’existence de deux entités - serbe et la fédération bosno-croate -  et l'existence au sein de cette dernière de 10 cantons (5 bosniaques, 3 croates et 2 mixtes). Ce morcellement se retrouve dans la répartition des compétences. Ainsi l’Intérieur relève de la compétence exclusive des entités. Tandis que la Justice obéit à un partage de compétence, l’État central, les deux entités et les dix cantons disposant chacun d’une parcelle de compétence. « Un tel système favorise tant la dispersion des pouvoirs que l’impossibilité d’aboutir à un consensus sur les réformes à mettre en œuvre » expliquaient trois sénateurs français dans un rapport publié en 2009. Le constat n'est pas automatiquement meilleur aujourd'hui. Dayton apparaît ainsi tout autant une garantie à la stabilité qu'une entrave à celle-ci. L'exemple le plus frappant est la sécurité. Celle-ci dépend de chacune des entités qui ont la responsabilité d'assurer la sécurité, ce qui engendre une multiplication des structures de police et complique la tâche dans la lutte contre la criminalité.

Les "27" qui devraient discuter de la situation de la Bosnie-Herzégovine, lundi, dans la perspective européenne se garderont sans doute bien d'aborder cette question. Renégocier Dayton ne sera pas très facile. Et il y aura sans doute autant de raisons de garder le status quo actuel. Mais il faudra bien un jour entamer ce débat.

NB : L'accord de Dayton peut être téléchargé dans la rubrique Textes internationaux

Son article II.2 c de l'annexe 4 précise ceci : "The Entities shall provide a safe and secure environment for all persons in their respective jurisdictions, by maintaining civilian law enforcement agencies operating in accordance with internationally recognized standards and with respect for the internationally recognized human rights and fundamental freedoms referred to in Article II above, and by taking such other measures as appropriate."

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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