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Des bateaux pour la marine de Djibouti. A quand pour son voisin somalien ?

(BRUXELLES2) La marine djiboutienne va pouvoir équiper ses navires de patrouille avec six moteurs puissants grâce... aux pirates.

Une contribution bien involontaire

Le responsable de l'opération anti-piraterie de l'UE (Atalanta), le Contre-amiral Canova a, en effet, officiellement remis à Djibouti, au Colonel Abdourahman Aden Cher de la marine djiboutienne, six moteurs hors bord puissants. La cérémonie de remise a eu lieu en présence de l'ambassadeur de l'UE, Nicola Delcroix, le 7 décembre dernier. Ces engins avaient été confisqués sur des skiffs pirates arraisonnés par la force européenne ; ceux-ci se voyant dotés de simples moteurs juste suffisants pour rejoindre la côte. Une fois révisés entièrement, ils vont permettre à la marine djiboutienne de disposer de moyens supplémentaires pour effectuer les patrouilles en mer à bord de ses navires semi-ridides.

En Somalie, l'abstinence...

Une initiative qui devrait pouvoir se prolonger sur la Somalie, à notre sens. Quand on lit le dernier article rédigé par Somalia report, on perçoit en effet tout le chemin à parcourir pour que la marine somalienne soit à la hauteur pour contrer les pirates. Pour surveiller les 3300 km des côtes, le chef de la Navy somalienne, l'Amiral Farah Omar Ahmed, n'a pas grand chose à sa disposition. Quelques hommes. Et c'est à peu tout.

Un premier bataillon de marine a ainsi commencé d'être formé en juin 2009. Mais deux ans après, note Somalia Report, il reste à quai. Il n'a pas de bateaux, peu d'équipement et pas d'argent. « Nos hommes ont beaucoup appris mais nous sommes incapables d'opérer en mer du fait du manque d'équipement » affirme le Col. Mohamed Abukar Hassan, n°2 de la marine (naissante) de Somalie. Mais la base navale au nord de Mogadiscio se trouve dans un bâtiment délabré : pas de porte, de fenêtre, d'eau et d'électricité ; l'ancienne base de Karaan étant sous contrôle des Al-Shabaab depuis leur retrait de la capitale somalienne.

Des soldats désarmés

Les cadets de la marine ne touchent que rarement leur salaire de 60$ par mois. Les uniformes sont rares selon le journaliste somalien. Quelques soldats sont bien armés d'une AK47. Mais c'est la seule arme visible. « Si nous sommes attaqués, nous ne pourrons nous défendre » souligne le colonel. Pas de véhicules, ni communication à part le téléphone mobile du colonel. Le propre bureau du Colonel n'a pas de chaises ni tables.

Sans bateaux et fuels

La marine somalienne a théoriquement 5 bateaux. Mais un seul est en état. Et bien souvent, elle n'a pas assez de fuel pour effectuer les patrouilles minimum. Le paiement des rançons par les compagnies incite à la piraterie considère le Colonel. Tandis qu'il juge sévèrement les mesures prises par plusieurs gouvernements, notamment le gouvernement britannique, d'autoriser les gardes privés armés. Cette mesure de D. Cameron « ne s'attaque pas aux vrais causes de la situation.» estime-t-il « La plus grande nécessité est d'améliorer l'armée et la marine somaliennes ».

On peut espérer que la nouvelle mission EUCAP HOA puisse remédier rapidement à cet état de fait. Même si ce n'est pas son objectif premier.

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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