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Des gardes armés à bord des navires de l’UE : il faut l’autoriser, disent 2 eurodéputés

(BRUXELLES2) L'UE doit renforcer ses moyens pour lutter la piraterie, c'est le message qu'ont voulu apporter deux membres du Parlement européen, membres de la commission des transports, à l'issue d'une audition publique sur la piraterie tenue le 12 octobre. Pour le Grec George Koumoutsakos et le Néerlandais Peter van Dalen (*), « l'UE doit combattre la piraterie avec tous les moyens nécessaires ». Entre 450 et 600 marins sont encore otages en Somalie selon Koumoutsakos. Et l'UE « doit essayer de libérer ces personnes aussi vite que possible ». « Outre l'aspect humain, il y a l'aspect économique » a ajouté Van Dalen « les pirates menacent la ligne de vie importante pour le commerce international » que représente l'approvisionnement maritime. Les deux eurodéputés veulent organiser un débat en plénière du Parlement pour amplifier les résultats obtenus lors de cette audition et faire pression sur les Etats de l'UE.

(*) l'un membre de Nouvelle Démocratie (affilié au groupe majoritaire au Parlement européen des Chrétiens-démocrates ; l'autre de Christen Unie, affilié au groupe des conservateurs et eurosceptiques ECR

Autoriser l'embarquement de gardes armés

Les pays européens doivent « continuer à assurer des escortes avec des navires militaires » soulignent les deux eurodéputés. Et ils devraient permettre à leurs armateurs d'embarquer à bord du personnel armé et assermenté. « Les armateurs sont tenus d'assurer la sécurité de leur navire, de leur équipage et des marchandises transportées. Mais dans de telles circonstances, il est impossible de faire cela sans personnel supplémentaire armé. (Car) la mission de l'UE Atalanta - qui accomplit déjà un grand travail - ne peut pas garantir la sécurité dans tout l'Océan indien. »  Devant l'augmentation de la menace, « les armateurs européens ont besoin de personnel armé à bord des navires et les Etats européens devraient permettre cette solution » affirment les deux eurodéputés.

L'argent des rançons dort dans des comptes européens

Il est nécessaire également que les pays européens se penchent davantage sur les flux financiers généras par les rançons, selon les deux eurodéputés. « On estime le total des rançons déjà payées entre 300 et 500 millions d'euros. Il y a des indications que cet argent va à des seigneurs de guerre somaliens qui placent cet argent sur des comptes bancaires, y compris dans des pays d'Europe ».

Commentaire : la Commission européenne en carence

Il est assez étonnant que, en plus de trois ans, depuis la résurgence de la piraterie, les autorités européennes n'aient pas encore conçu une réponse plus globale à la piraterie. Hormis la production d'un guide de bonne conduite pour faire face aux agressions, il n'y a en fait pas de réponse européenne au plan réglementaire et civil (je ne parle pas ici de la réponse militaire apportée par la mission Eunavfor Atalanta). On pourrait cependant penser qu'une norme européenne encadrant l'embarquement à bord des navires de gardes privés serait nécessaire. Mais, sur ce point comme sur les autres, la Commission européenne restait encore jusqu'à peu totalement attentiste. Quand je leur ai posé la question, à plusieurs reprises ces dernières années, c'est souvent l'étonnement, l'incrédulité ou l'ignorance des enjeux. Les réponses variant entre "Pourquoi devrions-nous agir ?" à "Mais nous n'avons pas les moyens". Or il s'agit ici d'une question de transport et de sûreté maritime, aussi importante que la lutte contre le terrorisme ou les explosifs, et de formation des équipages, pour lesquels l'Union européenne a des compétences. En laissant proliférer des législations aussi disparates que différentes, on introduit des différences notables entre les Etats qui va à l'inverse de la notion d'harmonisation du marché intérieur.

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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