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Le consensus de Wroclaw pour aller plus vite

La salle de réunion des ministres à l'intérieur du hall du centenaire (crédit : ministère polonais de la Défense)

(BRUXELLES2 à Wroclaw) A la réunion informelle des ministres de la Défense de Wroclaw, un consensus général s'est fait « pour aller plus vite et avoir des résultats concrets à court terme » dans le partage et la mutualisation (pooling and sharing) des moyens et équipements de défense, comme l'a expliqué à B2 au sortir de la réunion Claude-France Arnould, la directrice de l'Agence européenne de Défense. L'objectif fixé est de pouvoir présenter dès la réunion formelle des ministres de la Défense - le 30 novembre - une première sélection de projets précis, d'options, pour avoir un aval politique permettant de démarrer concrètement. Pour Me Arnould « Ce qui serait bien un moment que le Conseil européen puisse se saisir de ces questions, que les chefs d’État et de gouvernement soutiennent ce processus. »

L'Agence européenne de défense qui est le chef de file de ses sujets a constitué un petit groupe d'experts de haut niveau, anciens DGA ou chefs d'etat-major (*) chargés à la fois de « détecter les projets » et de rencontrer leurs homologues. « Des praticiens, d'expérience, nous permettent d’aller plus vite — commente C.F. Arnould —, ils ont les portes ouvertes, ils ont déjà les réseaux. Un CHOD ne refuse pas de recevoir un Camporini. Ou idem pour un DGA avec F. Lureau. Précision utile : ces sages ne sont pas payés au niveau européen mais restent au niveau national. Une condition posée dès le départ et qui a "dégonflé", de façon , certains souhaits de candidature présentés par plusieurs pays.

Projets à l'étude

Plusieurs projets sont à l'étude comme la formation des pilotes avions de transport ou l'unité multinationale intégrée de soutien médical. L'objectif est de pouvoir constituer une unité qui servirait de Rôle de 2 et pourrait être prépositionnée pour un départ sur une mission internationale, en intégrant différentes composantes nationales. Emmené par l'Italie, une dizaine d'Etats (dont la France) se sont montrés intéressés.

Expertiser les lacunes de Libye

Mais l'Agence a aussi comme tâche d'expertiser les « lacunes de la Libye ». On en connait les principales, à commencer par le ravitaillement en vol. Un projet d'échange d’heures en surplus, sorte de chambre de compensation pour les heures disponibles pourrait être mis en place. Certains appareils sont vieillissants aujourd'hui dans plusieurs pays. Mais d'autres ont une flotte encore disponible qui pourrait être mise à disposition d'autres. Et il y a des projets d'acquisition - ce projet s'inscrit dans l'avenir. Il faudra aussi résoudre un ou deux "problèmes techniques" comme le dispositif de ravitaillement en vol. Autres projets : le renseignement, les stocks de munitions laser guidées - une réunion s'est déjà tenue à la mi-septembre sur ce sujet au niveau des experts. Précisons que ce travail est mené en tandem. La présidence polonaise a pour tâche de faire un retour d'expérience au niveau politique et institutionnel. Tandis que l'Agence est chargée de mener un travail, plus technique, portant sur les capacités.

Economies ou économie ?

Claude-France Arnould a lors de la séance expliqué qu'il s'agit de ne pas faire d’économies de défense sans que ça reparte sur la défense et éviter que ça reparte au niveau du budget général. » Un constat généreusement approuvé autour de la table par le "syndicat" des ministres de la Défense. « Malheureusement, nous avons affaires à forte partie. Le syndicat des ministres des finances est plus fort » a confié à B2, non sans humour, un ministre participant à cette réunion.

Budget croissance zéro pour l'EDA

Au Conseil de novembre, l'Agence devrait présenter pour 2012, un budget dit "croissance zéro". L'agence sait qu'elle ne peut pas s’attendre à une augmentation mais souhaite que le budget ne diminue pas. Il est vrai qu'une bonne partie du budget de l'agence se trouve dans des projets où les contributions restent volontaires.

L'intérêt américain

L'agence continue son petit bonhomme de chemin vers une reconnaissance de son travail. Une récente visite aux Etats-Unis. Il y a un réel « intérêt pour ce qui peut être fait côté européen afin d'augmenter les capacités en général. Nous n'avons plus un discours assez idéologique en sorte, qui avait cours il y a quelques années sur le risque d'un compétition avec l'Otan. Ce qui préoccupe aujourd'hui c’est ce qui peut être fait concrètement par les Européens. Et comment faire pour les Européens prennent en main leur destin. » Ce qu'ils n'ont pas pu faire - reconnaissons-le depuis 40 ans - au sein de l'OTAN. Les Américains reconnaissent ainsi qu’il faut un puissant incitatif aux Européens pour dépenser, autrement dit... des industries nationales, des marchés industriels...

(*) Ce groupe des sages compte François Lureau (ex DGA), Vincezo Camporini (ex CEMA italien), le général Matts Nielsen (suédois), Eero Lavonen ( DGA finlandais). On ne le paie pas. Payés par les Etats membres.

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Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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