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Radek Sikorski : le partenariat oriental, un créateur de stabilité

crédit : NGV / B2

(BRUXELLES2 à Varsovie) Le sommet sur le Partenariat oriental, qui réunit jeudi et vendredi 28 et 29 septembre à Varsovie les pays de l'Union européenne et six pays de l'ex-URSS (Arménie, Azerbaïdjan, Biélorussie, Géorgie, Moldavie, Ukraine), approche. Et j'ai pu rencontrer - avec quelques collègues de la presse allemande et de RFI - le ministre polonais des Affaires étrangères, Radoslaw (Radek) Sikorski qui sera aux cotés de son Premier ministre, Donald Tusk, l'orfèvre de cette réunion, ainsi que plusieurs diplomates polonais.

Objectif de la rencontre : convaincre de la nécessité pour les Européens de prêter davantage d'attention à la frontière orientale, alors que les yeux et les attentions sont tournés, aujourd'hui et depuis plusieurs mois, vers le rivage sud. L'exercice n'est pas facile. Et le ministre, réputé brillant, le sait. Il défend ainsi ardemment l'initiative suédo-polonaise - devenu un projet européen -, d'un partenariat oriental. Un chemin pour créer de la stabilité sur notre frontière de l'Est, selon lui. Le ministre ne cache pas non plus qu'il s'agit d'un premier pas, vers un possible élargissement à l'Est ; et de son intérêt plus particulier pour la Biélorussie et l'Ukraine (qui ont été, au moins, en partie des terres polonaises). Pourtant, j'ai été un peu déçu. Le Ministre ne brille pas par la longueur de ses réponses, éludant certaines questions stratégiques comme le conflit en Transnistrie ou l'attitude à avoir avec la Russie, même s'il donne une description intéressante de la situation de la Pologne en Europe et de l'espoir que peut générer ce partenariat.

Où en est la Pologne aujourd'hui ?

Alors que nous sommes toujours au même emplacement géographique, nous avons bougé en Europe. Avant 1989, la Pologne c'était l’Europe de l’est. Quand nous sommes devenus candidats, elle était en Europe centrale. Aujourd'hui, avec le résultat de notre bonne résistance à la crise économique, et le fait que Donald Tusk (le premier ministre) soit considéré comme un leader de type nordique, nous sommes plus au nord. Il faut se souvenir que la Pologne il y a 200 ans avait déjà un système parlementaire, une place économique en Europe et un gouvernement civilisé. C’est un juste retour à la réalité en fait.

Qu'est-ce que l'UE, la présidence polonaise, met sur la table de ce sommet pour les pays du partenariat oriental ?

Nous sommes en train de finaliser la zone de libre échange et le traité d’association avec l’Ukraine. Cela n’a pas été chose facile. Cela représente des centaines et centaines de pages. Un tas comme çà (il montre de sa main à hauteur de son coeur). Quant il sera totalement appliqué, l'Ukraine aura mis en vigueur 80% de l’acquis communautaire. La libéralisation des visas : ce n’est pas une question de court ou moyen terme, il faut le faire aussi vite que possible. On veut aussi annoncer l’ouverture de la majeure partie des programmes européens  aux partenaires de l’Est. Il ne agit pas de créer de nouveaux programmes mais d’ouvrir ceux qui existent - comme Erasmus pour les étudiants -
à ces pays.

Cette réunion sur le partenariat oriental parait un premier pas. Quand les voyez-vous adhérer à l'UE. De votre vivant ?

Tout dépend comment on surmonte la crise aujourd'hui. J’en discutais avec mon collègue allemand, il  y a déjà 4 ans, Frank-Walter Steinmeier. On était alors dans un tout autre contexte. Et on pouvait envisager une date, aux environs de 2020 pour l’Ukraine. Pour la Moldavie, aussi, c’est abordable (dans cet horizon). Car ils ont des frontières communes tant avec l'Union européenne qu'avec l'Ukraine. La Géorgie a également fait de gros progrès. Pour la Biélorussie, l’opposition est mieux organisée que jamais ; elle est pro-européenne alors que le gouvernement est dans le doute. S'il y a un changement politique, on peut trouver rapidement une solution.

Un nouvel élargissement en quelque sorte ?

Nous ne sommes pas avocats de l’élargissement mais du partenariat oriental. Nous voulons qu’ils soient plus proches de nous, qu’ils nous ressemblent, qu'il n'y ait pas une zone d'instabilité à proximité de nous. Maintenant, tous ces pays qui participent au partenariat oriental sont des Etats européens, ils ont le droit en principe, selon le traité de Rome, de poser la candidature. Mais de la théorie à la pratique, il y a un pas. Tous ne sont pas dans cette position. L'Ukraine (qui a négocié un accord de libre échange et d'association), qui intègre 80% de l’acquis communautaire, sera sans conteste la plus proche de nous.

Comment comptez-vous régler le problème des conflits gelés comme celui de la Transnistrie ?

J’espère que les pays n’apporteront pas ce problème à ce forum, car il y a d’autres fora pour cela. D’autres conflits comme Gibraltar et Chypre n’ont toujours pas été résolus alors qu'ils sont entrés dans l'Union européenne. Le partenariat oriental a une autre fonction : organiser notre coopération. Le retour des négociations à un format 5+2 est une bonne chose. Et nous le soutenons. J’espère que ce problème pourra être résolu. Les Moldaves font ce qu’ils peuvent.

La Russie n'est pas invitée à cette réunion, comment voyez-vous l'arrivée, le retour de Poutine comme président ?

Ce n'est pas une surprise.

Etes-vous inquiet ?

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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