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Cathy Ashton, présente à l’informelle défense, … à distance

(BRUXELLES2) Non ! Vous ne verrez pas cette photo de proximité fin septembre à l'Informelle défense de fin septembre.

On pourrait croire à un bis repetita. La Haute représentante de l'UE pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité (HR) n'assistera pas, en effet, à la réunion informelle des ministres de la Défense de l'UE qui se déroule, les 23 et 24 septembre à Gand (Belgique). "Raisons de logistique", se justifie-t-elle par avance dans une lettre envoyée (en anglais) à tous les ministres de la Défense de l'UE. "Je ne regrette de ne pas pouvoir me joindre à vous".

La vidéo-conférence au secours de la Haute représentante

Dans le même temps, se déroule en effet à New York, l'assemblée générale de l'ONU, occasion rêvée pour un diplomate en chef de l'UE de nouer des contacts ou de prendre langue avec de nombreux pays. Cette réunion était prévue à l'avance. Et difficile de l'ignorer. Au niveau européen, personne ne veut donc assumer cette "bourde" dont la responsabilité ne peut être imputée à Cathy Ashton.

Les décisions "étaient déjà prises avant son arrivée", m'ont ainsi précisé plusieurs interlocuteurs. Et les Belges ont été "prévenus très vite de cette impossibilité d'emploi du temps pour un Haut représentant". Une alternative a bien été étudiée, au niveau dates. Mais impossible de faire machine arrière. La mécanique d'une présidence est chose trop lourde, pour pouvoir d'un trait de plume déplacer un conseil des ministres, même informel.

Cependant Cathy Ashton a tenu à ne pas répéter la bourde de Palma de Majorque (1). Et elle devrait assurer sa présence à la réunion du soir du 23, par la voie de... "la vidéo-conférence". Miracle de la technique qui permet de dédoubler un haut-représentant... mais qui n'empêche pas une certaine distance

Des recommandations aux ministres

Profitant de ce courrier d'excuse, la Haute représentante a donné aux Ministres son sentiment sur l'impulsion à donner sur la Politique européenne de sécurité et de défense commune. Enfin... impulsion si on veut. Car la tonalité est donnée dès les premiers mots.

Cette réunion se déroule "à un moment où la crise économique place une énorme pression sur les finances publiques dans toute l'Europe et, dans plusieurs des cas, des coupes importantes dans les budgets de défense sont inévitables" écrit-elle. "Nous avons besoin de démontrer les bénéfices de la PSDC, à la fois en termes d'efficacité opérationnelle mais aussi en termes de renforcement de notre interaction avec nos organisations partenaires (ONU, OTAN, OSCE et Union Africaine) - comme de renforcement de la coopération dans le développement des capacités."

Une tonalité qui n'est pas très optimiste et traduit bien le sentiment qu'on percevait dans certains milieux que pour la Haute représentante, l'Europe de la défense se conçoit bien avec distance, s'analyse aujourd'hui sur une position plutôt défensive qu'offensive, dans une question de positionnement sur les coûts que dans une démonstration de puissance.

Il faut "démontrer la valeur ajoutée de la PSDC"

La suite de la lettre n'incite d'ailleurs guère à l'optimisme, même si la HR dresse un tableau positif de l'Union européenne qui a "prouvé sa crédibilité" en matière militaire, comme civilo-militaire. Même si elle recommande aux Ministres " (avoir) un intérêt partagé à porter un regard nouveau sur comment faire face de la meilleure façon aux défis communs ensemble et quelles nouvelles idées nous devrions poursuivre", rien de très précis, ni de très nouveau n'est proposé. Si elle mentionne le "rôle croissant et important qu'a l'UE à jouer dans la réponse et la gestion de crises", évoquant "de possibles étapes" futures au "Moyen-Orient ou ailleurs", on en reste à cette généralité qui permet de masquer une absence de volontarisme patent, dénoncé d'ailleurs, très mezzo vocce, par plusieurs délégations d'Etats membres dont la France (2).

La lettre se termine d'ailleurs par cette avertissement qui semble désormais servir de maxime politique à la Haute représentante en matière d'Europe de la Défense. "Pour porter cette ambition sur des bases solides, notre ligne directrice dans les mois qui viennent devrait être de faire la démonstration de la valeur ajoutée et du rapport qualité / prix".

Ce faisant, la Haute représentante donne quelques armes à ses détracteurs qui notent une absence notable de propositions et de pouvoir d'impulsion, tant en matière opérationnelle que politique. De quoi accréditer l'opinion, de plus en plus partagée que non seulement "Il n'y a plus rien dans les tuyaux" - comme m'ont rapporté plusieurs témoignages concordants - mais aussi qu'il n'y a pas volonté d'alimenter la machine européenne.

(Nicolas Gros-Verheyde)

Lire également :
(1)  Ashton pas là à Majorque: regret, indifférence, amertume…
et L’absence d’Ashton à Palma fait grincer des dents… (maj)
(2) Nouvel échange de lettres entre Cathy et ce « cher Bernard »

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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