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Mission “Search and Rescue” pour le nouveau porte parole de Cathy Ashton

Michael Mann au briefing le 1er mars (crédit : EBS / Commission européenne)

Sa mission est ingrate. Et son titulaire le sait fort bien. Michael (Mike) Mann, avec son sourire ineffable et sa disponibilité, a commencé, mardi, sa mission de porte-parole pour Cathy Ashton, la Haute représentant de l'UE pour les affaires étrangères (et la politique de sécurité).

La mission est critique

Critique. Car la Haute représentante, 15 mois après sa nomination n'a pas su vraiment convaincre. Les critiques qui étaient auparavant concentrées dans le temps ou de certains pays membres commencent à devenir aujourd'hui continues et généralisés. Ce n'est pas seulement un ou deux députés "râleurs", un ou deux fonctionnaires "aigris" et quelques journaux "hostiles" qui grognent. C'est beaucoup plus profond. Et les portraits ou commentaires peu dithyrambiques qui fleurissent dans la presse ne sont pas dus au hasard. Au Parlement européen, c'est désormais une bonne partie des groupes politiques qui commence à être agacés. Même ceux qui soutiennent le rôle du HR ne se privent plus d'exprimer durement leur pensée. Des propos, qui même sur un blog comme celui-ci, ne sont pas reproduisibles.

L'ingérence a fait place à l'indifférence

Le cadeau de la "maison" à Mike !

Dans les Etats membres, on regarde aujourd'hui la Haute représentante se démener sans vraiment lui prêter assistance. Le temps des lettres ou remarques pour pointer un problème ou une incongruité s'est tari. Mais cela ne signifie pas que les relations se soient améliorées, au contraire semble-t-il. Les ministres ont remplacé l'énervement, l'ingérence par le mépris et l'indifférence. Témoin, lors du dernier conseil des ministres des affaires étrangères, dimanche soir (20 février) ; le dîner n'est pas encore terminé que plusieurs responsables s'éclipsent, sur la pointe des pieds. Au point qu'il n'y avait plus beaucoup de ministres au dessert et davantage d'ambassadeurs. Le lendemain, sitôt le conseil terminé, plusieurs ministres (Bildt, Frattini, Westerwelle) se précipitent en Egypte. Sur place, le Premier ministre UK, David Cameron a devancé tout le monde en arrivant la veille. Du coup,  rendez-vous prévus avec de hauts dignitaires du gouvernement sont annulés. Au conseil défense, c'est Rasmussen qui grille la politesse à la Baroness le 25 février (1). Et point final de la semaine, lundi (28 février) avec la présidence hongroise de l'UE qui ne prend même pas la peine d'associer un représentant de Cathy Ashton pour annoncer la décision prise par l'UE d'imposer des sanctions contre la Libye ; annonce faite par le ministre de ... l'Energie ! (2) Etc. Etc. Bref, pour les ministres comme pour l'OTAN, la Haute représentante commence à ressembler à un paillasson sur lequel on s'essuie gaiement.

Discrétion perfide à la maison-mère

A la Commission européenne, on ne dit mot officiellement de cette atmosphère. Et le sentiment est ambigü. Il n'est pas possible de laisser un de ses membres s'enfoncer, car il risque d'enfoncer le collège tout entier. Mais on ne se prive pas vraiment, dans l'entourage de quelques commissaires (notamment chez le commissaire à la politique du voisinage, Füle) de critiquer l'inaction de la Haute représentante.

Personne ne veut cependant évoquer le remplacement de Cathy Ashton car il ressort d'une équation si compliquée (une femme socialiste britannique) que personne ne veut reprendre ce tricot. Du moins aujourd'hui. Mais les esprits commencent à y songer dans certaines capitales. Le changement de majorité au Parlement européen (la présidence passant d'un chrétien-démocrate à un socialiste en janvier prochain) pourrait être idoine.

Du coté britannique, on semble ne pas avoir de problèmes avec la Haute représentante. Comme l'a raconté le chef du Foreign Office, William Hague à quelques confrères : "Je n'étais pas vraiment pour le Traité de Lisbonne et le poste du Haut représentant". Et de commenter plus loin : "le HR est faible". Pour finir par dire : je "soutiens Cathy Ashton". Albion n'a jamais aussi bien mérité son adjectif de "perfide" qui lui est souvent accolé. En revanche, on commence à être atteint par le faible poids du commissaire britannique (qu'est aussi Cathy Ashton)...

"Toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existé est absolument fortuite" (Crédit : UK Royal Navy)

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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