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Les Ministres de Défense de l’UE auront leur Conseil « décisionnel ». Bientôt ?

(BRUXELLES2 / A Palma de Majorque) C'était une demande de plusieurs ministres de la Défense de l'UE : avoir des réunions plus régulières et surtout "formelles" c'est-à-dire ayant une capacité autonome de décision. « Tout le monde est d'accord sur cette question » a précisé Carme Chacon lors de sa conférence de presse finale. Et d'expliquer : « Le Traité de Lisbonne renforce la politique de défense. Dix ans après le lancement de la politique de défense européenne, il faut renforcer notre rôle, institutionnellement. C’est une évidence. Il faut une instance au niveau européen qui puisse formaliser toutes les décisions que nous avons à prendre sur les opérations militaires, les capacités de défense, la mise en oeuvre des clauses de défense mutuelle et de solidarité. »

 

La position de C. Ashton. Cette déclaration rejoint, parfaitement, le propos de Catherine Ashton (la Haute représentante de l'UE pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité commune). Et Carme Chacon y a fait référence. Dans la lettre qu'elle a envoyée aux Ministres (et qui m'est parvenue, par erreur ), la HR précise que : « Des rencontres régulières de ministres de la défense sont essentielles pour guider le travail au coeur de la PeSDC, notamment pour lancer de façon efficace les opérations militaires et de l'UE et poursuivre notre travail de développement des capacités. » « Je suis personnellement engagée (sur cette question) », ajoute-t-elle.

 

Pourquoi un Conseil "formel" ? Aujourd'hui, il y a une réunion informelle (non décisionnelle) et une réunion formelle des Ministres de la Défense, chaque semestre. Mais cette dernière réunion se tient dans le cadre d'un Conseil des Ministres des Affaires étrangères. Et toute décision des Ministres de la Défense (par exemple le lancement d'une opération militaire, type Atalanta) est formellement prise par leurs homologues des Affaires étrangères. Ce qui est gênant, à tous point de vue (politique, sécurité, opérationnel, visibilité...). De plus, l'agenda est totalement encombré, ce qui laisse très peu de temps à de réelles discussions.

 

Concrètement ? Il y aurait un Conseil des Ministres des Affaires étrangères, en format ministres de la Défense, avec capacité décisionnelle autonome pour eux (comme il y a un Conseil des Affaires étrangères en format "Commerce" ou un Conseil des Ministres de l'Economie, en format Budget). On ne semble pas s'acheminer - pour l'instant - en effet, vers la création d'une nouvelle formation en tant que telle pour les Ministres de la Défense. Pour diverses raisons. Cela supposerait de réviser le règlement intérieur du Conseil, d'avoir une décision du Conseil européen voire (et surtout) de modifier le Traité. Celui-ci prévoit, en effet, formellement un Conseil des Affaires étrangères et un Conseil des Affaires générales (article 16). Et il précise que tout Conseil hors les Affaires étrangères est présidé par la présidence tournante de l'UE. Toute formation nouvelle ferait ainsi perdre à la Haute représentante de l'UE, son rôle d'unité de la politique étrangère et de la sécurité commune. Impensable... Sans compter que cela pourrait susciter quelques jalousies (les ministres de l'Intérieur opèrent dans le même Conseil que leurs homologues de la Justice, etc...).

 

Quelques questions à régler. Si accord il y a, il est pour l'instant politique. Il reste à voir les modalités concrètes, notamment : combien de réunions tenir ? Est-ce en même temps et en présence des Ministres des Affaires étrangères ? Quid des réunions informelles ? Les ministres des Affaires étrangères, concernés au deuxième chef, seront-ils tous d'accord également ? Etc... la discussion va désormais se poursuivre. Le prochain rendez-vous fixé est le conseil (jumbo) des Ministres des Affaires étrangères et de la Défense, les 26 et 27 avril à Luxembourg, où un débat au niveau ministériel aura lieu, à nouveau, sur la question. Le passage à l'acte pourrait donc avoir lieu plutôt sous présidence belge de l'UE (au 2e semestre 2010).

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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