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La stratégie de sécurité d’Ashton: ambition proche du 0°

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(BRUXELLES2) Catherine Ashton, la Haute représentante de l'UE pour les Affaires étrangères, était également à Münich, où elle a brossé
un portrait général de la politique européenne. « L'époque où la politique étrangère de l'UE pouvait être écartée comme seulement de la parole et pas d'action est derrière nous » s'est-elle félicitée. Il reste encore du travail bien sûr. « Nous devons développer des capacités supplémentaires pour la gestion de crises moderne. (...) Nous devons répondre de façon flexible, rapidement et effectivement » a-t-elle précisé.

Les menaces sont mondiales et nous dépendons de nos partenaires pour agir. Pour décider d'agir, Catherine Ashton fixe deux impératifs : « Premièrement, être clair sur ce qu'est (notre) stratégie politique et s'assurer que les moyens et objectifs sont accordés. Deuxièmement, avoir une vue large (de la situation). Aucune des menaces auxquelles nous faisons face est purement militaire par nature. Nous devrions toujours mobiliser toute la gamme des outils à notre disposition. (...) Mais même si nous avons nos politiques coordonnées et la volonté politique d'agir, l'Europe seule ne sera pas capable de résoudre les menaces déjà citées (1). Dans un monde profondément interdépendant où les menaces sont mondiales, tout le monde a besoin de partenaires ». Et la Haute représentante de lister ces partenariats : OTAN dans les Balkans et en Afghanistan, OSCE dans les Balkans en Géorgie, Union africaine en Somalie... Quant à la proposition russe de sécurité européenne, Catherine Ashton fait le service minimum: « Nous sommes ouverts à discuter d'idées qui pourraient renforcer la sécurité
européenne
» ; elle insiste sur un point : « l'OSCE doit avoir la première place pour les discussions sur l'initiative russe d'un Traité pour la sécurité européenne, et ajoute : « les Etats doivent être libres de rejoindre l'Alliance de sécurité qu'ils souhaitent ». Tiens, tiens ! Hillary Clinton n'aurait pas dit mieux sur ce point.

Commentaire : des généralités et une ambition proche du zéro ! Ce discours ne peut masquer que la Haute représentante ne se prononce à aucun moment pour l'autonomie d'action européenne. Dire que nous avons besoin de l'OSCE et de l'OTAN pour agir dans les Balkans et en Géorgie révèle une singulière absence d'ambition et est, surtout, faux. L'Europe est tout à fait en capacité d'agir seule dans ces deux zones ! (ce qui n'empêche d'agir en interconnexion avec d'autres organisations. De même, à force d'élargir les menaces de sécurité à tout et n'importe quoi (la mafia, l'immigration...), la politique de défense et de sécurité devient un palliatif à d'autres politiques "intérieures". C'est oublier que ce qui constitue l'âme, le coeur de l'action de la PSDC c'est de prévenir une attaque extérieure, de ramener ou préserver la stabilité d'un pays. En un mot bref : la paix. En fait, bien souvent, la Haute représentante de l'UE reprend, en la polissant légèrement, une position plus US qu'UE. Heureusement le discours du ministre allemand des Affaires étrangères est autrement plus ambitieux pour l'Europe !

(1)  « Nous vivons dans un monde d'une complexité grandissante avec de nombreuses menaces et défis, comme les Etats défaillants, terrorisme, crime organisé, prolifération des armes de destruction massive, cyber-sécurité. Des questions plus larges affectent la sécurité de nos citoyens : énergie, changements climatiques et accès aux ressources naturelles, immigration illégale et trafic d'êtres humains ».

(crédit photo : Münich Security Conference, Kai Moerk - Catherine Ashton en discussion avec le ministre allemand de la Défense Zu Gutenberg)

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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