Airbus A400M: le premier vol a eu lieu avec succès. Et maintenant ?
(BRUXELLES2) Le premier vol de l'A400M - le futur avion militaire européen - s'est déroulé sans encombre, vendredi à Séville, devant un parterre de personnalités - le Roi Juan Carlos, les ministres de la Défense (l'Espagnole Carme Chacon, le Français Hervé Morin...).
L'avion militaire a décollé à 10h16 très précisément avec un équipage européen (pilote britannique, Edward "Ed" Strongman, copilote espagnol, et 4 ingénieurs aéronautiques français : Jean-Philippe Cottet, Eric Isorce, Gérard Leskerpit, Didier Ronceray). Un vol de 3 heures 47 très exactement avec... un atterrissage réussi. Le plus important !
On ne redira jamais assez l'importance de ce vol. Après des années noires et, en pleine renégociation du contrat, avec ses commanditaires, Airbus Military respire un peu. Certes tout reste à faire. Et ce sera encore long avant d'arriver aux premières livraisons. Les premiers avions ne pourront être livrés qu'au plus tôt fin 2012, voire en 2013 (Ce sont les Français et Britanniques (1) qui seront servis en premier. Pour les Allemands ce sera plutôt 2016). Mais pour la première fois depuis plusieurs mois, il y a une bulle d'air au-dessus de l'A400M. A court terme, toute la question est maintenant de travailler sur les termes de l'avenir : le calendrier de livraison des avions, le budget supplémentaire nécessaire, les compensations aux retards, les moyens matériels de pallier le gap entre la date prévue et la date finale de livraison, et la nécessité de garder tout le monde "à bord".
La discussion financière
Le surcoût demandé par Airbus aux partenaires reviendrait à 5,2-5,3 milliards d'euros selon la presse allemande et française. Les clients pourraient aussi avoir le choix de garder l'enveloppe intacte et de commander moins d'avions. Ce qui reviendrait à augmenter le coût unitaire par avion à environ 140 millions d'euros, selon Reuters. Les 7 Etats clients ont préparé une lettre explicitant leurs conditions, lettre qui doit être expédiée à Airbus cette semaine, selon Der Spiegel. L'objectif est d'avoir, selon certaines sources gouvernementales, un contrat révisé à l'horizon de mars 2010.
Garder tout le monde à bord
Pour les Français, comme pour les Belgo-Luxembourgeois, la question ne se pose pas. Allemands (2) et Turcs ont également confirmé leur intérêt, tout comme les Malaisiens. Pour les Britanniques, c'est plus flou. Car le Royaume-Uni subit plus que tout le monde la crise économique (des coupes sont à prévoir pour 2010-2011) et a une double pression supplémentaire : 1) budgétaire avec les interventions en Afghanistan et en Irak (lire : plus 4 milliards de £) et 2) financière avec le dérapage de la livre sterling (celle-ci a perdu 1/3 de sa valeur par rapport à l'euro et fait désormais quasiment jeu égal 1 £ = 1,10 Euros). Quand on sait qu'une partie des coûts de l'A400M sont calculés en euros, point besoin de dessin !
L'export à relancer ?
Ce premier vol a aussi une grande vertu : à l'international, il permet à l'avionneur européen de repartir à l'attaque de nouveaux contrats. Le moment n'est sans doute pas bienvenu, en pleine récession budgétaire. Et l'abandon par l'Afrique du Sud (sera-t-il définitif ?) n'a pas donné le bon signal. Mais l'Airbus A400M a un avantage : il n'a pas de concurrent direct dans le futur. Toutes les solutions proposées (C130J, C17, Casa...) sont des solutions alternatives qui reposent sur des avions conçus - au bas mot - il y a 20 ans. Donc, qui seront à terme, dépassées. Jusqu'ici l'A400M avait un gros inconvénient : on ne savait pas s'il volerait un jour. Cette question est désormais résolue. EADS peut maintenant repartir à l'assaut. Gagner un seul contrat à l'export permettrait de relâcher un peu la pression sur les partenaires et de gager ainsi différement la facture supplémentaire. En gros, une solution bénéficiaire pour tout le monde.
(NVG)
Pour regarder le vol (profitez-en, cela dure 3 minutes), c'est ici
(1) Les Britanniques ont prévu un ISD pas avant décembre 2015 et un dérapage financier de 0,5 milliards de £ pour ce qui les concerne.
(2) Le plein respect du contrat est inscrit dans l'accord de coalition. « Beim Rüstungsprojekt A400M besteht die Koalition auf volständiger Erfüllung des Vertrages. Der strategische Lufttransport wird sicher gestellt. »
(Crédit photo: Airbus military)
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