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2 autres attaques pirates « hors zone ». Faut-il renforcer Atalanta ?

(BRUXELLES2) Les pirates se sont adaptés, très vite à la nouvelle donne. Evitant de concentrer leurs attaques sur le Golfe d'Aden où la densité de navires de guerre est plus forte, ils attaquent désormais sur d'autres zones de l'Océan indien, notamment au nord-est des Seychelles et la zone sud du bassin somalien (au large de la Tanzanie).

Ainsi, mardi, au lever du jour, vers 6 heures du matin (locales), c'est un navire porte-container battant pavillon danois, le MV Nele Maersk qui a été attaqué à 1000 milles nautiques au nord-est des côtes somaliennes, non loin de la zone (à quelques dizaines de milles près) où avait été attaqué hier le pétrolier BW Lion, apprend-on du QG d'Atalanta. Les pirates à bord de deux skiffs blancs ont utilisé leurs armes automatiques sur le navire mais celui-ci a pu leur échapper en accélérant.

Une heure et demi plus tard (locales), c'était au tour d'un autre porte-container, battant pavillon des Iles Marshall, le MV Felicitas Richmers, d'être attaqué, cette fois au sud du bassin somalien : à 530 milles à l'est de Dar es Salaam (Tanzaine) et à 420 milles nautiques à l'ouest de Victoria (Seychelles). Il a réussi à s'échapper avec diverses méthodes d'évitement et en accélérant (semble-t-il l'utilisation de pompes à incendie et d'autres méthodes anti-pirates).

Une question : faut-il étendre encore le champ d'action d'Atalanta ?

Tout l'Océan indien est "pirates-area" Il n'y a plus de zone "hors risque". Le message d'alerte qui préconisait, il y a peu encore, une distance minimale des côtes somaliennes de 300 milles nautiques, distance portée à 500 puis 600 milles semble maintenant caduque. Il n'y a plus de zone "à risque zéro" en tant que telle. Si les côtes somaliennes demeurent par excellence une zone de tous les dangers, c'est dans tout l'Océan indien, y compris à l'approche des Seychelles que les navires doivent veiller. Du coup, on peut se poser la question s'il ne faut pas aussi étendre la zone de couverture des forces multinationales et particulièrement de l'opération européenne anti-piraterie "Atalanta". Celle-ci avait déjà augmenté d'un tiers sa zone d'action en couvrant les Seychelles. Si la zone de couverture devrait être revue, il faudrait encore cette zone, jusqu'au canal de Mozambique, au sud, et à l'est.

Cette question en entraîne plusieurs autres. Au plan juridique, cela n'oblige pas à revoir, au moins, partiellement la résolution du Conseil de sécurité de l'ONU qui ne prévoit une action que "au large des côtes de la Somalie" (lire L'extension aux Seychelles est-elle bien légale ? Essai d'analyse...) ? Car maintenant, ce sont carrément les côtes des Seychelles (demain des Maldives ?), de la Tanzanie (demain de Mayotte, des Comores ou de Madagascar) qui semblent concernées. Au plan opérationnel, cela oblige à revoir les moyens. Ce qui n'est pas évident. Le général Bentegeat, lors de sa dernière réunion du Comité militaire de l'UE le 4 novembre, estimait déjà manquer de moyens.

Un manque de frégates pour couvrir la zone. « La plupart des moyens sont positionnés dans le Golfe d’Aden alors que la plupart des
attaques sont dans le bassin somalien, au sud du Golfe d’Aden
. Et là (dans le sud), Atalanta est seule : pour escorter les bateaux du PAM, de l'Amisom et assurer la sécurité des autres navires. Nous avons donc besoin de davantage de moyens dans le bassin somalien. » a souligné le général Bentegeat. L'offre des Etats membres ne semble pas encore suffisante. « Il y a environ 3-4 bateaux engagés pour 2010 là où il nous en faudrait de 6 à 10 pour couvrir cette zone ». NB : les ministres de la Défense de l'UE doivent décider, le 17 novembre, de reconduire l'opération Atalanta pour un an. Ils devront se pencher sérieusement sur cette question de moyens.

NB : les pirates somaliens détienent aujourd'hui au moins 10 navires et retiennent en otage 200 personnes.

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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