La poursuite en justice des pirates marque le pas
(BRUXELLES2) Ce qui avait fait la marque même de l'opération européenne anti-piraterie EUNAVFOR Atalanta : la poursuite en justice des pirates. Celle-ci semble marquer le pas. La libération des suspects par la frégate allemande Brandenburg, le 15 septembre, le montre. Comme fin août, des suspects relâches par les Norvégiens.
A cela plusieurs raisons
Tout d'abord, le manque d'entrain ou de places disponibles dans les Etats de la région. Au Kenya, l'évacuation est devenue plus délicate ces derniers temps. Les prisons kenyanes semblent pleines et les Kenyans peu prêts d'accepter de nouveaux prisonniers. Les procédures judiciaires en cours ne se déroulent pas aussi bien que prévu. Avec la Tanzanie, l'accord entrevu un moment donné, semble pour l'instant gelé. Quant à l'accord avec les Seychelles, si les spécialistes européennes mettent la main sur un accord de transfert de suspects (et également de protection des troupes (SOFA) pour l'installation d'une (petite) base logistique aérienne et/ou maritime), il ne faut pas en espérer beaucoup. Selon plusieurs experts, l'archipel de l'Océan indien ne pourra pas vraiment accepter beaucoup de prisonniers. Et se posera toujours la question de "la distance". C'est d'ailleurs la seconde motivation de cette évolution.
Une raison opérationnelle : la distance. Un transfert au Kenya ou dans un autre pays signifie un retour au port pour une frégate, donc une
perte opérationnelle de plus d'une dizaine de jours. La libération est alors le moindre mal...
Enfin, viennent des motivations juridiques. Plusieurs suspects semblent avoir été libérés car les preuves étaient "limites", trop faibles.
Afin de remédier à cet état de fait, deux Etats au moins - l'Espagne avec un projet présenté en novembre 2008 et la France avec un projet datant de septembre 2009 - semblent avoir décidé de revenir à la solution du "rapatriement" des pirates en Europe. Solution envisagée au début de l'opération et abandonnée ensuite sous le poids des difficultés juridiques. Il faut, en effet, avoir dans le droit national une incrimination suffisamment solide pour englober toutes les hypothèses, une compétence universelle en fait en matière de piraterie (comme le permet les conventions internationales sur le droit de la mer), une délégation à une autorité pour l'arrestation et un tribunal compétent et une procédure adéquate conforme à la fois aux normes nationales et européennes (notamment de la Cour européenne des droits de l'homme : traduction devant un juge dans un délai rapide, droits de la défense...).