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La PESD ne peut pas tout faire mais est utile, dixit le Général Bentegeat

(BRUXELLES2) Le général Henri Bentegeat, président du comité militaire de l'UE (et ancien chef d'Etat-major français), ne s'est pas contenté, jeudi, de faire le point des opérations militaires en cours devant les parlementaires de la sous-commission défense du Parlement européen (voir sur la Bosnie ou la Somalie), il a aussi donné son point de vue sur l'évolution de la politique européenne de défense et la coopération avec l'OTAN. Répondant à un député britannique eurosceptique, de talent (ca existe !), Geoffroy Van Orden,  il a eu un ton plus personnel, presque sous la forme d'un "coming out", lui avouant : « vous savez, moi aussi, avant de prendre ce poste, j'étais plutôt sceptique sur la politique européenne de défense. Et voilà... après trois ans. Je peux vous dire : c’est utile et nécessaire ».

Otan - UE ont un rôle différent. « L'UE en matière « de défense et de sécurité, n'est pas comparable à l'OTAN. Elle n'en a ni les objectifs, ni les moyens. » explique Bentegeat.  Avec un chiffre à la clé, « il a répondu à toutes les critiques qui avancent l'argument de la duplication. A l' Otan, vous avez 15000 personnes ; à l'UE, 200 personnes. Vous pouvez avoir une idée de la duplication qu’on peut avoir. Peut-on vraiment comparer.... ». Il a aussi mis en avant un point : « La PESD ne peut pas s'exercer à l'intérieur de l'Union européenne. Tandis que l'OTAN le peut ». NB: on parle ici d'une intervention militaire pour défendre les Etats membres contre une agression directe, la PESD est, en effet, un outil au service de la "politique étrangère", une politique de projection de forces, pourrait-on dire. Et uniquement cela... A l'inverse, l'OTAN a pour rôle primaire, historique et principal, d'assurer la défense des Etats membres. « Une situation qui pourrait changer avec le Traité de Lisbonne » a précisé le général (avec l'apparition des clauses de solidarité).

Pas d'opération de haute intensité possible sans un QG permanent... et les USA. Avoir une opération de haute intensité (du type de celle
menée par les Etats-Unis en Irak ou l'Otan en Afghanistan), ce n'est pas possible, « L'UE n'y est pas prête. Les moyens de renseignement, de commandement ne pas prêts pour une opération de grande envergure. Et, pour cela il nous faudrait un quartier général permanent. » Mais l'accord n'existe pas entre les 27. « Il y a une petite majorité pour (pour des raisons opérationnelles). Et une forte minorité contre (par crainte de déplaire aux Etats-Unis). » Et le général de compléter par la réalité opérationnelle : « pour mener une opération de haute
intensité, il faut (au moins) l’appui des Etats-Unis
». Fermez le ban...

La valeur ajoutée de l'UE. Ce n'est pas pour autant que l'UE n'a pas sa propre force, sa propre valeur ajoutée. Pour Bentegeat, elle se situe à
« deux niveaux »  : « 1° Elle est la seule organisation capable d'une approche globale, intégrée, de la prévention et de la gestion des  crises. Par exemple, en Bosnie-Herzégovine depuis 2004, les activités de la force militaire et de la mission de police sont coordonnées en permanence par le Représentant spécial. Autre exemple, l au Tchad où l'opération EUFOR « a été entièrement planifiée entre le Secrétariat Général et la Commission. (...) 2° Dans de nombreux cas, l'UE est le seul acteur international accepté par les parties en conflits. Exemple, au Tchad. » (NB : On pourrait aussi ajouter la  Géorgie ou Timor oriental dans le passé).

 

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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