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L’Espagne retire ses troupes de la Kfor au Kosovo


(B2) La ministre espagnole de la Défense, Carme Chacon, l'a annoncé, hier (jeudi 19 mars), lors d'une visite aux soldats espagnols basés au Kosovo (l'ancienne province serbe devenue indépendante). Les 620 soldats espagnols intégrés dans la force de l'OTAN au Kosovo (KFOR) vont se retirer d'ici l'été. «La mission est accomplie. Il est temps de rentrer à la maison». «Ce retrait sera échelonné, et en coordination avec les alliés» a-t-elle ajouté, selon ce que relate El Pais. A noter que durant toute sa visite au Kosovo - dont l'Espagne n'a pas reconnu l'indépendance — la ministre a bien pris soin de ne se prêter à aucun signe qui puisse s'assimiler à une telle reconnaissance, comme l'explique mon confrère.

Ce mouvement anticipe, de fait, la réduction du volume de la KFOR, dans laquelle pourrait s'engager l'OTAN dans les prochains mois. D'environ 15.500 soldats actuellement (ce qui est énorme pour un pays qui a la taille de deux départements français), la KFOR devrait ainsi passer, selon un premier projet par vagues successives à 9000 militaires, puis 7000, et à une force résiduelle de 2500 soldats. Cette troisième phase étant située à moyen terme.

Cette décision a surpris et un peu fâché au siège de l'Alliance. Le secrétaire général de l'OTAN, Jaap de Hoop Scheffer, jouant le détachement, n'a pu cacher sa surprise et sa déception devant cette décision. Il a estimé qu'il « ne connaissait pas les conditions du retrait». Et d'ajouter tout de même, comme un rappel à l'ordre : «Si nous changeons la taille et la structure de la mission, nous devons le faire à la suite d'une décision prise au sein de l'Alliance». De fait, il semble bien que l'OTAN ait été mise devant le fait accompli. Les 26 Membres de l'Alliance devaient en discuter lors du sommet de Kehl-Strasbourg puis en juin. Et là la surprise est totale. En fait, « le secrétaire général l’a appris dans l’avion le mercredi soir par un appel téléphonique de la Ministre », m'a expliqué un de ses proches. Et « aucun signe ne laissait pressentir cette décision ». La Ministre s'était effectivement entretenue oralement mercredi avec le secrétaire général de l'OTAN et officiellement communiquée par lettre jeudi. « Au moins nous avons été informés avant la presse » a expliqué un responsable de l'Alliance, un rien pincé. Au siège de l'Alliance, on est un peu inquiet et on craint que ce retrait ne fasse tâche d’huile ou serve d'exemple pour le retrait d’autres contingents (Roumanie, Pologne...). Les militaires chargés de la planification vont se réunir pour revoir le plan de déploiement. C'est en effet un gros contingent qui s'en va.

Commentaire : Même si les deux dossiers ne sont pas intrinquément liés, cette décision est à rapprocher de deux autres discussions. Celle entre les Européens, au sein de l'Union européenne, sur la diminution de volume de l'opération Althea en Bosnie. L'Espagne, qui entretient un gros contingent, voulait également se retirer. Et l'avait annoncé depuis octobre dernier. Mais de nombreux Européens voulaient garder la mission, surtout sous commandement de l'OTAN. Et la décision semble difficile à prendre (lire ici).
Autre discussion : celle sur les renforts en Afghanistan. Autrement dit : les Espagnols semblent dire à l'Alliance, si vous voulez plus de troupes là, il faut enlever des troupes ici. Et vous ne voulez pas nous les enlèverons quand même.

 (NGV)

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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