RDC : “Je n’ai pas su convaincre mes collègues”, Bernard Kouchner
(B2)C'est un Bernard Kouchner, pas découragé mais plutôt amer qui a fait face aux journalistes, après la réunion des 27 ministres des Affaires étrangères, le ministre français qui présidait la réunion n'a pas pu s'empêcher de montrer les limites de l'enthousiasme européen par rapport à la situation conflictuelle qui prévaut en République démocratique du Congo (ex-Zaïre).
Pas d'indignation sans image. "La situation dégrade, et c’est un vrai crève cœur de voir que de plus en plus de monde dans les camps de déplacés, qu’on a déjà visité. Mais qu’est-ce qu’on peut faire ? "J’ai dit qu’il fallait que l’Europe fasse quelque chose, en sécurisant les humanitaires. Mais que voulez-vous. (...) Je n'ai pas réussi à convaincre mes collègues". Et d'expliquer : "Il n’y a pas d’indignation sans image. Et vous verrez de plus en plus d’images ravagées sur le Nord Kivu". a-t-il averti. La situation est vraiment complexe, car il y a des combats entre plusieurs groupes (CNDP, Mai-Mai) ainsi que l'armée congolaise - dont certains groupes - ont commis également de nombreuses exactions".
Les capacités militaires européennes limitées. Mais le dépit perçait sous la politesse du propos. Si le Ministre n'a pas voulu mettre en cause ses collègues de la défense (*), il n'en était
pas loin. "On m'a répondu (sur sa proposition d'intervention européenne) que les capacités européennes ne sont pas suffisamment disponibles. Il faut sûrement renforcer notre politique européenne de sécurité et de défense". Concernant les deux battlegroups de permanence, il a confirmé que les Allemands ne voulaient pas intervenir. Les Britanniques non plus mais de façon moins affirmée. En fait, le salut va venir de l'Inde. "Puisque Karel (De Gucht, le ministre belge), nous l'a confirmé, l'Inde va envoyer 1200 Guhrkas" (ils devraient arriver d'ici la fin du mois).
Les règles d'engagement de la Monuc en cause. Sans doute faut-il aussi renforcer la Monuc dont les "règles d'engagement ne sont peut-être pas bien définies. Que voulez-vous faire, nous avons des troupes qui parfois ne peuvent pas tirer, ou seulement pour se défendre." Voilà pour les propos publics...
"Kinshasa, il serait temps d'y retourner". Ensuite, sortant de la salle, et croisant le général Joana - ancien responsable de la mission "réforme de la sécurité (Eusec)" au Congo et aujourd'hui conseiller Afrique de Javier Solana, le haut représentant de l'UE pour la politique étrangère - qui le salue "On s'est vu à Kinshasha, M. le ministre", Kouchner n'a pu s'empêcher de lui répliquer, tout à trac : "Ben oui Kinshasa, il serait temps d'y retourner, et même plus à l'est" explique-t-il.
(*) De façon générale, tous les Ministres de la défense de l'UE étaient réticents à une intervention militaire contrairement à certains ministres des Affaires étrangères, belge et néerlandais notamment plus enclins à celle-ci.
(NGV)
(Photo : Conseil de l'Union européenne)
Je ne vois pas comment nous pourrions intervenir en Afrique plus qu’aujourd’hui. Après tout, les Africains ne peuvent pas nous reprocher en permanence notre impérialisme, et nous appeler au secour dès qu’il y a une guerre civile quelque part.
La dernière fois que la France s’est engagée de la sorte, c’était pour l’opération Turquoise, et on ne cesse de nous le reprocher aujourd’hui.
La seule solution serait de redéfinir éventuellement les missions des casques bleus de l’ONU, en leur donnant l’ordre de prendre partie et non de séparer les béligérants… mais je ne suis pas bien sûr que cela pourrait de toute façon améliorer réellement la situation… Tout cela est bien malheureux…