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Un plaidoyer britannique pour l’Europe de la défense, si si !


(B2)Ming Campbell, alias Sir Menzies, n'est pas vraiment un anticonformiste. Mais il est dans l'opposition (libérale démocrate). Et son rapport sur la défense britannique ne laisse pas l'ombre d'un doute, comme le titre le laisse penser: "Pas d'autre choix que de changer". "A moins que la stratégie de défense soit fondamentalement remaniée, les militaires continueront à souffrir des tensions du surengagement et l'insuffisance des équipements". explique-t-il. "Nos militaires ont été « sous tension » durant des années, "le budget (de la défense) est en crise. Il y a d'énormes lacunes dans la qualité, la quantité et l'utilité du matériel militaire disponible pour les opérations".

L'armée britannique est soumise à rude contribution
Sir Menzies, interrogé par le quotidien The Sun, illustre son propos - s'appuyant sur des rapports du ministère de la Défense Uk : 46% de la flotte des véhicules de combat légers Warrior sont bons pour le service (364 sur 793). La moitié des chars légers est en fonction (596 sur 1192). Et un tiers des camions de transport Saxon est opérationnel (49 sur 147)... "Chacune de nos forces armées devrait faire moins et différemment, ou alors nous aurons besoin d'une augmentation du budget de la défense, ce qui sera difficile à justifier pour les contribuables" résume Sir Menzies dans son rapport.

La limite absolue de l'engagement extérieur est atteinte
"Les déploiements en Iraq et Afghanistan ne peuvent être durablement supportés "simultanément". "C'est un fait accepté par les officiers supérieurs" précise le député. Même le retrait d'Iraq ne sera pas suffisant. Tout simplement car l'engagement en Afghanistan est maintenant une operation qui s'inscrit dans la durée et qui n'avait pas été prévue dans la stratégie de 1998 sur la défense britannique. Celle-ci était calibrée sur un "déploiement en zone de combat relativement court" et une autre mission plus longue dans une zone moins exposée, ainsi que de petits missions de maintien de la paix. L'engagement au Kosovo a montré la "limite absolue du déploiement" britannique. Au point que le pays ne peut qu'à peine contribuer à la mission des Nations-Unies au Darfour, en dépit de la pression politique et de l'opinion publique dans ce sens. Le coût des missions en Iraq et Afghanistan depuis 2001 tourne autour de 10 milliards de livres ! "C'est un choix auquel doivent se résoudre les Britanniques : "quelles expéditions entreprendre, avec quels partenaires et avec quel équipement nécessaire."

La Grande-Bretagne doit réaliser qu'elle ne peut plus agir seule
Le choix est également stratégique : c'est "le rôle de la Grande-Bretagne dans le monde" qu'il faut revoir. "Avoir pris part à des opérations agressives en Iraq et Afghanistan a amené nos forces à la limite de la rupture", dit le député. Le Royaume-Uni ne peut plus agir seul. "S'il veut garder un rôle d'influence, ce peut être seulement en choisissant et intégrant des stratégies avec des alliés qui partagent le même objectif". La résistance au Royaume-Uni à l'intégration militaire avec des partenaires européens est né d'un "nationalisme dépassé". "L'intégration à l'Europe ne signifie pas la création d'une armée européenne. Mais des marchés publics, une interopérabilité et une spécialisation des forces qui peut être réalisée si une volonté politique existe pour faire cela". Il n'y a pas d'autre choix, considère Sir Menzies : "il faut approfondir la collaboration et le partage des outils avec nos alliés de l'Otan et de la Pesd. Une telle approche peut signifier des dépenses similaires ou plus grandes à court-terme mais peut produire de significatives économies à plus long terme"...

Conclusion : la PESD doit être une "priorité diplomatique pour le Royaume-Uni"


La relation avec les Etats-Unis est au centre de toute la stratégie de 1998. Mais elle ne doit pas conduire à un "surengagement des forces britanniques" et elle ne doit être absolue si on suit Sir Menzies. "La réapparition de la coopération européenne de défense. Il y a des possibilités significatives pour développer et mettre en commun les capacités militaires européennes à travers la PESD. Son développement doit être la "priorité diplomatique pour le Royaume-Uni" estime-il. L'argument que la PESD saperait l'Otan est largement réglé. Les Etats-Unis (eux-mêmes) assurent que le potentiel de la PESD améliore les capacités de l'Otan. Le député reprend ainsi les propos de l'ambassadrice US à l'Otan, Barbara Nulands, à Paris, en février dernier : ce que nous avons besoin "c'est d'une défense européenne plus forte,plus capable. Une PESD avec un soft power uniquement n'est pas assez".  Avec Nicolas Sarkozy repositionnant la France et rejoignant les structures de commandement de l'Otan, la Grande-Bretagne a "à la fois une responsabilité et une opportunité de partager et conduire le futur de la défense européenne".

• Pour télécharger le rapport (anglais), ici

Sir Menzies n'est plus tout jeune. Né en 1941, il a été un sportif de haut niveau. Courant le 100 m aux JO de Tokyo... en 1964, c'est peu le Guy Drut grand-breton. Elu député à la chambre des communes, il a été dans plusieurs commissions notamment celle de la défense. Il siège avec les libéraux démocrates, écossais, le troisième parti outre-Manche. Il a notamment pris la défense des droits des Gurkhas, ces soldats des anciennes colonies indiennes, qui ont formé l'ossature de l'armée britannique, durant des années, et que le gouvernement veut expulser aujourd'hui, une fois la retraite venue.

(NGV)

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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