Analyse BlogHistoire européenne

[Yougoslavie Mémoire d’un désastre] 1999. Pressions sur le médecin légiste du massacre de Racak au Kosovo?

(BRUXELLES2) Dans sa biographie, qui vient d'être publiée à Helsinki, la spécialiste en médecine légale dentaire, Helena Ranta, raconte que des officiels du ministère finlandais des affaires étrangères ont essayé d'influencer le contenu de son rapport sur le massacre de Racak au Kosovo.

Le 15 janvier 1999, une quarantaine d'Albanais y avaient été tués à Racak au Kosovo. Ce massacre, notamment, a contribué à convaincre l'OTAN de lancer des bombardements de la Yougoslavie au printemps 1999. Helena Ranta avait été chargée par l'Union européenne d'enquêter et rédiger un rapport. Le rapport a été remis - à l'été 2000 - au tribunal pénal pour l'ex-Yougoslavie de la Haye et un résumé rendu aux Etats membres de l'UE. Mais il ne semblait pas suffisamment mettre en lumière la notion de crime contre l'humanité.

Le chef de la direction politique du ministère finlandais des Affaires étrangères, de l'époque Pertti Torstila (aujourd'hui secrétaire d'Etat) lui aurait demander de retirer de son rapport certains commentaires qui étaient trop modérés sur les allégations de crime contre l'humanité, selon le quotidien Helsingin Sanomat. "J'ai les emails trois fonctionnaires du Ministère qui ont tenté de me faire "approfondir" les conclusions" explique-t-elle, pour dire qu'il y avait bien eu exécution, et que certains coups de feu étaient des "coups de grâce". L'experte préférait, elle, s'en tenir aux conclusions de médecine légale et non pas entrer dans des considérations qui lui semblaient "politiques et juridiques". (Torstila a démenti dans un email envoyé à nos confrères finlandais et parle d'un dialogue avec l'experte "pour chercher la vérité").

Ranta racontre également que William Walker, le chef de la mission de surveillance de l'OSCE au Kosovo, était particulièrement furieux des conclusions de son rapport "au point de briser son stylo" car elle n'utilisait pas de mots assez durs sur les Serbes.

Pour lire un commentaire sur le résumé du rapport de Racak

(NGV)

(ce livre a été écrit par Kaius Niemi, un rédacteur en chef du journal, connu également pour ses reportages en Iraq).

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

s2Member®