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La Serbie dans l’UE, en 2012 ou 2013 ?

(B2) Les émois serbes à l’égard du Kosovo doivent-ils être pris au sérieux ? Oui, si l’on en croit le ton des principaux dirigeants qui, encore, hier, disaient en fait "jamais sans le Kosovo", "choisir entre le Kosovo et l'Europe, je choisis c'est le Kosovo"... Il ne faut pas se prendre à de tels leurres.

Que cherchent à négocier les Serbes ? Certainement pas le Kosovo. Ils l’ont déjà perdu, comme les quatre guerres déjà perdues de 1991 à 1999 (Slovénie, Croatie, Bosnie, Kosovo). Et, même si officiellement, ceux-ci ne veulent pas le reconnaître, dans leurs négociations concrètes avec la CE sur l’accord de stabilisation (l'ASA), ils n’évoquent qu’à peine le sort de leur ancienne province.

Le Kosovo ne figure d'ailleurs pas dans les projets d'attribution des futurs fonds européens pour la Serbie. "Il n'en jamais été ainsi. Et la Serbie n'a jamais fait de cette question un préalable" me confiait un fonctionnaire proche du dossier (comme on dit quand on ne veut pas citer une source haut placée).

L’intérêt Serbe n’est-il pas plutôt dans l'UE ? Malgré les dénégations de leurs dirigeants, l’objectif ne semble-t-il pas plutôt de négocier une adhésion accélérée à l’UE pour, sinon de rattraper la Croatie (la Croatie vise 2011 pour son adhésion), au moins avoir une adhésion quasi simultanée ?

Ce qui ne pose pas de problèmes majeurs, exceptée la question des criminels de guerre (qui est en passe d'être réglée, du moins si on en croit l'arrestation de Karadzic, dimanche soir). De l’aveu du sérail européen, la Serbie est « plus solide » que certains Etats membres déjà membres (Roumanie et surtout Bulgarie) ou pays candidats (Macédoine).

La Serbie, membre de l'UE d'ici 2013 ?
Il y a un an, Janez Jansa, le Premier ministre slovène, me confiait - à l'issue d'un Conseil européen - qu'il voyait l'adhésion d'une majorité d'Etats des Balkans d'ici la fin de la période des fonds structurels (2013). Et on peut croire cet homme généralement bien renseigné pour des pays qui étaient, il y a encore peu, dans le même Etat. Pour la France qui assure - ce deuxième semestre 2008 - la présidence de l'UE, amener à une candidature reconnue de la Serbie, serait une belle victoire, et sur le passé, et pour l'avenir.

Un futur pouvoir de blocage... pour le Kosovo (qui pourrait s'en mordre les doigts)
L'intérêt est bien compris par les Serbes. Une fois à l’intérieur de l’UE, la Serbie aura une voix au chapitre sur les futures adhésions. Les décisions étant prises à l’unanimité. La Serbie pourra, alors, calmement, bloquer tout engagement de négociation, voire ouverture ou fermeture de chapitre (comme la France menace de le faire pour la Turquie), ou la signature du traité global d'adhésion d’un futur Etat Kosovar indépendant… à moins que d’ici là elle ne change d’avis.

(NGV)

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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