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L’Europe des citoyens doit arriver maintenant !

(B2) Avec le résultat du référendum irlandais, après ceux de France et des Pays-Bas, il faut bien se rendre à l’évidence. Le sentiment croissant des citoyens, qui se méfient de l’Europe et sont prêts à croire à toutes les chimères possibles, oblige à une réflexion interne rapide sur le sens de l’Europe et les politiques communautaires. Ce d'autant que, le rapport Lamassoure le démontre, le chantier est immense.

Pas de modification institutionnelle nécessaire...
Pour cela, point besoin de nouveau Traité. On peut même dire que, services d’intérêt général mis à part (et encore), sur les questions sociales ou de libre circulation des personnes, le Traité de Lisbonne n’apporte rien de fondamentalement nouveau qui ne puisse déjà se réaliser avec le Traité de Nice, avec un peu de bonne volonté. La libre circulation des personnes, la protection des travailleurs, la sécurité sociale, la lutte contre l’exclusion sociale … sont, en effet, restés un des grands chantiers inachevés de ces dernières années. Dans le souffle du marché unique, cette « liberté » était déjà un des parents pauvres. L’arrivée de l’Euro – qui a resserré les politiques monétaires et budgétaires —, le grand élargissement vers l’Est — qui a, de fait, reposé des questions qui n’avaient été que partiellement résolues lors des élargissements méditerranéens — auraient dû être des opportunités merveilleuses pour repenser certaines questions. Il n’en a rien été…

L'Europe des projets est resté un slogan...
« L’Europe des résultats » ou « L’Europe des Projets » de la Commission Barroso est surtout resté un slogan. Certes un certain nombre de projets « bons pour les citoyens » ont vu le jour : le « Roaming », la « sécurité routière » ou les « listes noires Aviation ». Mais il s’agit davantage d’un « coup de peinture » sur des projets existants, déjà engagés dans la machine institutionnelle, et justifiés pour d’autres raisons, économiques notamment, sans réelle vue d’ensemble. De plus, ils ne touchent qu’à la marge la préoccupation majeure de nombre de citoyens : l’emploi, la santé, le pouvoir d’achat, la retraite. Qu’il s’agisse de fermeture d’usines, de restructuration de pans entiers de l’économie, d’Euro cher, de hausse des prix des produits de base (alimentation, gasoil…), l’Europe a esquivé, ces derniers mois, les questions fondamentales, avec des arguties pseudo-juridiques. Elle a renvoyé souvent la balle ailleurs : « aux Etats d’agir » « Il faut d’abord faire des réformes structurelles avant tout », « C’est la mondialisation » ont été souvent les réponses… Donnant ainsi aux citoyens, l’impression d’une Europe incapable de prendre en considération certains de leurs problèmes. Une Europe qui avançait d’un pas décidé, inflexible, sans prendre garde aux effets collatéraux. Bref, une Europe incapable de faire de la politique…

Quelques pistes pour commencer
Certaines questions minent le tissu économique et social : la restructuration de certains secteurs touchés de plein fouet par l’évolution du prix du pétrole (routiers, pêcheurs…) devrait faire l’objet de plans de restructuration conçus au niveau européen. Les problèmes sont quasi-identiques et les politiques en partie impulsées par « Bruxelles ». De même les zones grises entre « salariés » et « indépendants », les rythmes de travail… devraient faire l’objet d’une attention accrue. Enfin, tous les problèmes que rencontrent les citoyens qui partent travailler, étudier ou vivre dans un autre pays d’Europe devraient être rapidement résolus. Sur ce sujet, le rapport que doit présenter l’eurodéputé Alain Lamassoure à la présidence française sera fondamental. Soit il s’agit d’une mauvaise application, et la Commission doit sortir son bâton contre les Etats récalcitrants. Soit il s’agit de vides juridiques, et elle doit proposer des solutions pour pallier ces vides. Soit il s’agit d’une mauvaise information, et d’autres solutions innovantes doivent être inventées.

Dans tous les cas, l'action doit prendre le pas sur la rhétorique et l'attentisme.

 (NGV)

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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