Conseil des ministres de la Défense. Un engagement prolongé sur plusieurs fronts
(B2 - archives) Réunis au sein du Conseil des ministres des Relations extérieures, les ministres de la Défense ont procédé à une redéfinition des capacités militaires et une revue générale des opérations en cours.
Renforcement limité de l'état-major
Sur un rapport de Javier Solana, les Ministres ont opté pour un renforcement à minima des capacités de planification de l’état major européen, opérant un subtil compromis entre ceux qui voulaient un renforcement net de l’état-major et ceux qui n’en voulaient pas. Seuls quelques recrutements nouveaux ayant été autorisés (environ 5), le renforcement de la capacité de planification se fera surtout « par redéploiement interne », en « veillant bien à ce que les personnes recrutées (ou envoyées par les États membres) aient une expérience dans la planification ».
Des lacunes de capacités
Le Conseil a pris note avec « satisfaction » des progrès accomplis dans le processus de développement des capacités militaires dans le cadre des « objectifs 2010 », ainsi que du catalogue de progrès 2007. Basé sur le catalogue 2005, ce document est « un élément fondamental » a souligné le ministre portugais de la Défense, Nuno Severiano Teixeira, qui présidait la réunion. Car « il fait le point très clairement de où nous en sommes et ce qui reste à faire ». L’Europe a encore « des carences dans trois domaines : le déploiement (transport) stratégique et tactique, la protection de nos forces, le renseignement », a-t-il ajouté.
Les Ministres — en formation du Conseil d’administration de l’Agence européenne de Défense, donc à 26 (le Danemark bénéficie d’un opt-out en matière de défense) — ont adopté le budget de l’Agence européenne de défense. Un budget annuel de 32 millions d’euros (20 millions pour le fonctionnement, six millions pour les opérations, six millions pour certaines tâches). Ils ont refusé de doter l’agence d’un cadre pluriannuel. « Ce que nous avons le plus besoin c’est du soutien de tous les États membres » a insisté lors de sa conférence de presse, Alexander Weis, le directeur général de l’Agence. Il a aussi estimé « qu’un cadre pluriannuel trop détaillé, trop rigide n’aurait aucun intérêt ».
Revue de détail des opérations
Balkans. Les Ministres de la Défense ont affirmé vouloir maintenir une présence militaire en Bosnie-Herzégovine « aussi longtemps que nécessaire » pour contribuer à la sécurité (un changement par rapport à la situation actuelle qui prévoyait une fin de mission, en août 2008). L’opération Althea, reconfigurée, est composée de 2500 hommes, dont la toute nouvelle force de gendarmerie européenne. Autour de la table, l’inquiétude était d’ailleurs palpable, notamment des pays proches, comme la Slovénie. Le ministre slovène de la Défense, notamment, n’a pas caché que la Bosnie était un des problèmes les plus difficiles à résoudre. « Si la situation est stable actuellement au niveau de la sécurité, la situation politique mérite une attention soutenue » a résumé devant la presse N. Teixeira, le ministre portugais de la Défense. Il a cependant dénié « envisager un transfert de forces, venant du Kosovo ».
La mission de police en Bosnie-Herzégovine (EUPM), a aussi été prolongée (jusqu’au 31 décembre 2009), les Ministres estimant que la situation actuelle ne permettait pas un retrait.
Concernant le Kosovo, les Ministres ont pris note de la planification de la mission Etat de droit au Kosovo et décidé l’extension du mandat de l’EUPT jusqu’au 31 mars 2008.
Guinée-Bissau. Le Conseil a donné son feu vert à l’option d’une mission PESD visant à soutenir le processus de réforme du secteur de la sécurité, après une mission préliminaire d’exploration faite à la mi-octobre.
Tchad. « Expression concrète d’un engagement global de l’Union européenne pour améliorer la situation de sécurité », les Ministres ont rappelé que cette opération était « neutre, multinationale et indépendante et que le déploiement a été souhaité par les deux gouvernements du Tchad et de République centrafricaine ». Une manière de répondre à certaines critiques au sein du Parlement européen notamment et à la tension née sur place après l’arrestation de membres de l’association française « Arche de Zoé – Children Rescue ». Les Ministres ont affirmé, aussi, vouloir « soutenir l’effort » du général Nash à trouver les capacités supplémentaires. Selon nos informations, la Slovénie devrait annoncer, le 21 novembre, lors d'une prochaine réunion de la conférence de génération de forces, l’envoi d’une unité médicale pour l’hôpital de campagne manquant.
Darfour. Les Ministres ont réaffirmé soutenir la mission hybride Onu/Union africaine (Minuad) au Soudan – Darfour en réponse au cri d’alarme de l’Onu (lire : La Minuad au Darfour clouée au sol ?).
RD Congo. Les Ministres sont inquiets sur la situation. La relance du processus de désarmement, de démobilisation et de réintégration, engagée en décembre 2006, « ne s’est pas matérialisée durant ces six derniers mois ». L’Union européenne « encourage donc tous les acteurs à s’impliquer davantage ». Des progrès continus dans la réforme du secteur de sécurité restent aussi « nécessaires pour assurer une stabilité durable » de la république, de même que l’élaboration d’un « concept détaillé pour les forces armées futures » et la « réforme du système de police et de justice ».
Moyen-Orient. Le Conseil a confirmé son soutien à la mission de police civile en Palestine (EUPOL Copps), à la mission d’assistance à la frontière au point de passage de Rafah (EUBAM Rafah), qui conserve son potentiel opérationnel en dépit de la fermeture du point de passage. De même, il a salué l’extension de la mission Etat de droit en Irak (EUJUST Lex) qui continuera son travail jusqu’au 30 juin 2009.
Afghanistan. Lancée en juin 2007, la montée en puissance de la mission EUPOL – visant à renforcer la capacité de police et de lutte contre la criminalité du gouvernement afghan - est plus lente que prévue, selon les observateurs. Le Conseil a donc prudemment pris note qu’elle devrait « atteindre sa pleine capacité opérationnelle en mars 2008 ».
(Nicolas Gros-Verheyde)
article publié dans Europolitique le 20 novembre 2007