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Nitrates : le pressing de la France pour échapper aux sanctions

(B2) La France a traîné jusqu'au dernier moment

L’ardoise est désormais connue. La France risque 28 millions d’euros d’amende, au minimum, et une astreinte de 117 882 euros par jour si elle ne s’engage pas rapidement et concrètement à faire revenir ses eaux bretonnes au-dessous de la norme nitrates. Bonne mère, la Commission européenne a cependant fait un petit cadeau, de dernière minute, à la France, en lui donnant un délai supplémentaire de trois mois. Un délai qui tombe pile au lendemain des législatives ! Hasard ? Le contexte électoral n’a pas du tout joué, explique-t-on officiellement « Nous avons tenu compte des dernières initiatives annoncées, qui sont encourageantes. Maintenant il faut voir les détails et les modalités » assure Stavros Dimas, le commissaire à l’Environnement. Personne n’est dupe cependant.

Mettre 11 sites en conformité en quelques mois

Si la Commission a en effet reçu, au tout dernier moment, le 13 mars exactement, des Français un « dossier étayé », il était déjà « tard » assure un spécialiste du dossier. Pour analyser ce qui est « une vraie bible, avec un éventail de mesures par bassin versant, il nous faut un peu de temps ». D’autant que plusieurs points de divergence opposent encore les experts européens et français. A commencer par le nombre de rivières en cause : 11 selon Bruxelles (Urne, Aber Wrac’h, Guindy, Les Echelles, Ic, Bizien, Horn, Leff à Lannebert et à Yvias, Gouessant, Arguenon), 9 selon Paris. L’aspect volontaire des mesures, notamment en matière de réduction des cheptels, laisse aussi sceptique à la Commission. De même que le calendrier trop souple.

Le pack français a joué mais n'a pas marqué l'essai

Mais, bien évidemment, c’est surtout le contexte électoral qui a joué. Outre les contacts à tout niveau — diplomates, députés européens, lobbys, tout le monde s’y est mis — un entretien téléphonique a eu lieu au plus haut niveau, entre Dominique de Villepin, Jacques Chirac et le président de la Commission, José-Manuel Barroso, mardi soir ou mercredi matin. « Un peu tard en fait », commente un homme du sérail européen, « nous avions déjà trouvé un compromis » entre commissaires. « Tout dépendra maintenant de la bonne volonté française. Les services en préfecture vont devoir préparer toutes les mesures et le nouveau gouvernement doit être prêt à les avaliser, immédiatement après sa nomination». Sinon les juges seront saisis. « Le commissaire Dimas a toute latitude pour décider de poursuivre ou non la procédure. Il peut appuyer sur le bouton à tout moment » explique un de ses proches.

Epée de Damoclès

Et personne du coté français n’ose parier sur la tendresse des juges à l’égard d’un Etat fondateur qui aura mis près de 20 ans à se mettre en conformité…

 (NGV)

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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