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Les heures supplémentaires des salariés à temps partiel doivent être payées comme leurs collègues à temps plein

(B2) L’arrêt que vient de prononcer la Cour de justice pourrait mettre en cause la législation française sur les heures complémentaires (heures payées comme du temps normal de travail et non comme une heure supplémentaire). «Une réglementation nationale qui a pour conséquence que les travailleurs à temps partiel sont moins bien rémunérés que les travailleurs à temps plein pour le même nombre d‘heures effectuées viole le principe de l’égalité des rémunérations » à deux conditions : (1) « si elle affecte un pourcentage considérablement plus élevé de travailleurs féminins que masculins et (2) si elle n’est pas objectivement justifiée » estime la CJCE (arrêt du 6 décembre, Ursula Voß / Land Berlin, affaire C-300/06).

La première condition étant structurellement remplie dans la plupart des cas (le temps partiel étant majoritairement féminin), il ne restera à l’Etat membre qu’à prouver qu’elle est justifiée. La Cour enfonce, ainsi, le clou et confirme un premier arrêt sur le sujet (arrêt Elsner du 27 mai 2004, C-285/02). Al’image de la législation Simap – Jaeger sur le temps de garde, les Etats membres vont devoir maintenant s’exécuter.

Les faits. L’affaire est née en Allemagne où Me Voß est enseignante (fonctionnaire) du Land de Berlin. Exerçant son activité à temps partiel, elle a assuré des cours supplémentaires. Mais la rémunération qu’elle a perçue pour cette période était inférieure à celle qu’un enseignant employé à temps plein aurait perçu pour le même nombre d’heures de travail. La demande de Me Voß de recevoir une rémunération équivalente s’est heurtée à la loi allemande (qui comme nombre de lois européennes) permet cette différence de rémunération. Illégal estime la Cour qui rappelle, tout d’abord, que le principe de l’égalité des rémunérations s’oppose non seulement à une discrimination directe, mais également à toute différence de traitement en application de critères non fondés sur le sexe lorsque celle-ci affecte considérablement plus de travailleurs féminins que de travailleurs masculins et ne peut s’expliquer par des facteurs objectivement justifiés et étrangers à toute discrimination fondée sur le sexe.

Raisonnement de la Cour. La Cour constate, ensuite, que la rémunération inférieure des heures supplémentaires entraîne une différence de traitement au détriment des enseignants travaillant à temps partiel, parce que ceux-ci se voient appliquer un taux de rémunération inférieur pour les heures de cours effectuées au-delà de leur horaire individuel et à concurrence de la durée normale de travail à temps plein. Cette différence de traitement pourrait affecter un nombre considérablement plus élevé de femmes que d’hommes. La juridiction de renvoi doit prendre en considération l’ensemble des travailleurs soumis à la réglementation nationale en cause. La Cour estime que cette mesure ne semble pas objectivement justifiée, mais invite cependant la juridiction nationale de renvoi à vérifier cet aspect.

(NGV)

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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