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La fin d’un long parcours, la signature du traité d’adhésion avec la Roumanie et la Bulgarie

Simon de Saxe-Coburg (crédit : CE)
Simon de Saxe-Coburg (crédit : CE)

(Archives B2)  Il est 18 h 15 à l’abbaye de Neumünster, dans le centre de la ville de Luxembourg. L’hymne européen retentit, sur un rythme surprenant, léger, aérien, sous la houlette du « Mystère des voix bulgares ». Les applaudissements fusent dans la cour rectangulaire. Chacun des pays est ensuite appelé par ordre alphabétique à venir sur l'estrade signer un nouveau Traité d'adhésion... cette fois pour la Bulgarie et la Roumanie.

La fin d'un long parcours

Siméon de Saxe-Cobourg, premier ministre bulgare, particulièrement ému, ne peut s’empêcher d’en appeler à l’idéal des pères-fondateurs de l’Europe. « C'est indéniablement un des plus grands évènements de l’histoire de notre pays. La Bulgarie rejoint la communauté des peuples européens qui est la sienne. (...) Réunir les peuples européens n’était-ce pas l’ambition des fondateurs de l’Europe. Nous franchissons un pas de plus vers la réunification du continent. Ce n’est pas seulement un traité entre Etats. C’est surtout l’union entre citoyens que nous faisons ».

Tandis que son homologue roumain, Traian Basescu, reprend la formule historique célèbre : « We come back », ajoutant « Thank you Europe »

L’Europe comptera 27 Etats en 2007

Le traité d’adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie qui vient d’être signé — et qui doit être encore ratifié dans les 27 Etats concernés — clôt plusieurs années de négociation et quelques périodes de tension. La Roumanie et la Bulgarie — les derniers des douze pays d’Europe centrale et orientale à qui l’Europe avait promis l’adhésion — devraient adhérer au 1er janvier 2007. « Devraient » car comme le rappelait le commissaire européen chargé de l’élargissement, Olli Rehn, « les autorités de ces deux pays ne peuvent pas se reposer sur leurs lauriers. Beaucoup de travail les attend en 2005 et 2006 ».

De nombreux points à régler encore

Tout ne sera pas encore réglé. Car surtout d’un point de vue économique et sociale, la situation dans ces pays de la mer noire n’est pas brillante. Le produit intérieur brut (PIB) par habitant est le plus faible d’Europe, atteignant seulement 30 % de la moyenne communautaire. Et de nombreux points restent encore à améliorer. La lutte contre le crime organisé et contre la corruption minent ces deux pays de la mer noire. La réforme du système judiciaire est toujours balbutiante. Les droits des minorités et des tziganes ne sont pas bien assurés, notamment dans les écoles et les hôpitaux. Enfin, particulièrement en Roumanie, le régime des subventions publiques n’est pas vraiment conforme aux règles de la concurrence. Afin d’éviter toute surprise, l’Europe a d’ailleurs prévu une clause, permettant de reporter l’adhésion si nécessaire. Décision prise normalement à l'unanimité des 25 Etats membres, sur recommandation de la Commission européenne. Cette clause de report sera facilitée pour la Roumanie. Dans certains domaines (concurrence, affaires judiciaires ou pénales), la décision pourra être prise à la majorité.

A titre d'observateur dès maintenant

Quoi qu’il en soit, dès aujourd’hui, les ministres roumains et bulgares participeront à tous les conseils des ministres. A titre d’observateur, sans droit de vote mais avec liberté de parole. Des représentants des Parlements roumains et bulgares siégeront, eux, aux cotés de leurs collègues dans les travées du Parlement européen. L’Europe comptera alors 22 langues… Mais, une fois n’est pas coutume, avec la Roumanie et la Bulgarie, ce sont deux Etats, à la volonté et à la foi francophones chevillées au corps qui rejoignent l’Union européenne. A nous de ne pas les décevoir…


D'autres pays à la porte

Le prochain élargissement concernera les Balkans à qui l’Europe a promis un « avenir européen » tout comme à la Turquie d’ailleurs. Tous ne sont pas au même stade.

Trois pays candidats

Trois pays ont déjà déposé formellement une demande d’adhésion. Les négociations en ce sens devraient commencer rapidement pour la Croatie, dès que le cas épineux de la coopération avec le tribunal pénal pour l’ex-Yougoslavie pour la « livraison » du général Gotovina sera réglé (adhésion possible à l’horizon 2009). Pour la Turquie, les négociations pourraient démarrer en octobre si une série de réformes — comme le code pénal ou la liberté religieuse — sont accomplies (aucune date d’adhésion annoncée, vers 2013-2015 sans doute). Pour la Macédoine, la Commission doit remettre un rapport avant la fin de l’année.

Des pays des Balkans candidats naturels

Les autres pays des Balkans — y compris le Kosovo — sont encore au stade de négocier un « accord d’association et de stabilisation », sorte de premier pas vers l’adhésion : l’Albanie depuis 2003. La Serbie-Monténégro vient de recevoir le feu vert pour entamer pareille négociation. La Bosnie-Herzégovine est un peu en retard.

Pour les autres pays à l'est... dans un autre siècle !

Quant à l’Ukraine, la Moldavie — et la plupart pays de l’ex-Urss — il n’est pas question, pour l’instant, d’intégrer l’Union européenne mais uniquement de tisser, dans le cadre de la nouvelle « politique de voisinage », des liens économiques et culturels plus étroits.

(Nicolas Gros-Verheyde)
Version enrichie et complétée d'un article paru dans Ouest-France, avril 2005

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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